Océane Sorel pensait que son métier de virologue était “barbant”, que “tout le monde en avait marre d’entendre parler de la Covid-19”. Mais c’était avant de voir l’intérêt reçu lors d’une conférence en ligne de l’association ADFE-Français du Monde sur le sujet à laquelle elle a participé en janvier. C’est pourquoi, il y a près d’un mois, elle a décidé de créer le compte Instagram The French Virologist sur lequel elle combat la désinformation et la propagation de rumeurs sur les virus et les vaccins, tout en vulgarisant la science. “Le but est d’éduquer sans prétention, montrer la solution plutôt que le problème”, résume-t-elle.
Un compte lancé en français, car “il y a beaucoup de “fake news” qui circulent en France, et déjà des personnes qui font ce travail de démenti en anglais”, justifie la trentenaire installée à San Diego. “J’en avais marre de lire ça, je voulais apporter des éléments de réponse à partir de sources sérieuses et vérifiées”, précise la Bretonne citant des sources institutionnelles comme le CDC, la FDA ou encore la Haute autorité de la santé. Qui plus est, elle a été poussée par ses proches et ses “followers” qui la questionnaient.
Si elle a décidé de “prendre le problème à la racine” maintenant, c’est aussi parce que “la situation a empiré avec l’apparition des vaccins”. “Il a fallu convaincre qu’ils ne sont pas une arme chimique, mais une solution.” Elle intervient alors au travers de posts quasi-quotidien et de stories sur le réseau social pour enlever cette peur de l’inconnu.
Et ainsi, vulgariser la science. “Je me suis rendu compte que les scientifiques ont du mal à communiquer avec le grand public et ils manquent de temps. Or il ne faut pas laisser les autres parler de ce que l’on fait à notre place. Dans les médias, certaines informations sont documentées, mais beaucoup sont bâclées”, abonde la virologue qui évolue depuis fin 2019 dans une entreprise de biotechnologie près de San Diego, après avoir réalisé deux “postdocs” à Los Angeles (à USC et UCI).
Et qui de mieux qu’elle ? Effectuant des recherches sur les thérapies géniques et le développement des vecteurs viraux, elle a longtemps travaillé sur les herpès, mais aussi le virus de la varicelle ou Ebola. “Ce qui m’intéresse chez les virus, c’est de suivre leur évolution, de voir comment ils s’adaptent à leurs hôtes.”
Tous les virus décortiqués
Chaque post est inspiré par les dizaines de questions qu’elle reçoit quotidiennement, que ce soit sur la Covid-19 ou d’autres virus comme Ebola, le HPV ou le HIV. Pour rendre ces concepts scientifiques intelligibles, elle réalise des vidéos à partir de dessins qu’elle anime. Une activité, réalisée sur son temps personnel, qui lui prend plusieurs heures par jour. Car chaque post nécessite un long temps de recherches en bibliothèque.
Au travers de ses réponses, la virologue essaie également de pallier au manque de communication de la part des autorités, comme pour le vaccin AstraZeneca suspendu par plusieurs pays, une décision qu’elle juge “politique”. “J’ai d’ailleurs fait un post sur les vaccins anti-Covid. La conclusion : prenez le premier disponible pour votre catégorie”, insiste Océane Sorel qui refuse de juger ; précisant : “je ne fais pas de recherches professionnelles sur les vaccins, il n’y a donc pas de conflit d’intérêt.” Son objectif est de donner confiance en la parole scientifique, en évitant de tomber dans le sensationnel ou le drame.
Je ne donne pas de conseils médicaux. La science, ce n’est pas une opinion, une religion ou une nuance politique, ce sont des faits vérifiés.”
Elle rappelle notamment que, contrairement aux rumeurs, “la mortalité du Covid-19 est dix fois supérieure à celle de la grippe. Il faut arrêter de regarder les chiffres déformés, l’espérance de vie a diminué.” Parmi les théories du complot qui reviennent le plus à ses oreilles, elle cite les idées selon lesquelles les vaccins modifieraient l’ADN, celle selon laquelle ils incorporeraient des puces 5G, le fait qu’ils causeraient l’infertilité des femmes ou de l’autisme… Pour démentir ces “fake news”, elle revient alors aux bases : “comment fonctionne un ARN (molécule issue de la transcription d’un gène et qui permet la synthèse d’une protéine) et un ADN.” Et chaque personne convaincue, qui reprend confiance en la science, est vécue “comme une victoire”. “Je veux donner un peu d’espoir, même s’il est mesuré.”
Tout en admettant que sa contribution reste “juste une goutte d’eau au milieu de l’océan”, elle préfère s’investir plutôt que rester à soupirer. Et elle ne compte pas s’arrêter avec la fin de l’épidémie. Tous les virus passeront sous le microscope de The French Virologist.
Quelques posts d’Océane Sorel: