Tous musiciens ? Les tablettes et téléphones, combinés à la richesse d’Internet, n’ont jamais rendu l’accès à la musique si facile et ludique, et c’est sur ce créneau que plusieurs start-ups françaises présentes à South by Southwest ont choisi de se placer. Chacune espérant réussir aussi bien que Deezer, le grand frère modèle.
« Le monde des start-up liées à la musique est très européen. Deezer est français, Spotify suédois, SoundCloud allemand, Shazam anglais… Idem pour les fabricants de logiciels, et les grands DJs », explique Jean-Baptiste Hironde, 28 ans, rencontré sur le pavillon français.
Pour lui, pas de doute que la France a une carte à jouer dans ce secteur. Edjing, sa start-up, en est l’illustration : son application pour mixer et jouer au DJ sur son iPhone ou iPad fait un carton. « Nous avons 25 millions de téléchargements, et on devrait atteindre 100 millions à la fin 2015 », prédit ce DJ et ingénieur originaire de Versailles (« comme Daft Punk et Phoenix »), qui emploie 28 personnes à Boulogne. Ces chiffres conséquents permettent à la start-up d’être rentable, alors que ses utilisateurs payants ne représentent moins de 2% du total. Elle a levé 2,5 millions d’euros – parmi ses investisseurs, figure Daniel Marhely, fondateur de Deezer.
A SxSW, Jean-Baptiste Hironde était là pour créer des contacts en vue d’une prochaine installation de bureaux à New York : Edjing compte 40% de ses utilisateurs aux Etats-Unis. Il en a aussi profité pour présenter son Mixfader, sur le marché à l’été 2015, et premier pas de la start-up dans l’univers des objets connectés. Ce petit crossfader, relié en Bluetooth à l’application, permet de “scratcher” – une sensation et des mouvements qu’il était difficile de dématérialiser.
Les objets connectés musicaux, c’est aussi le domaine de Phonotonic. Cette start-up parisienne vient de lancer ses petites balles en plastique colorées, dotées de capteurs et reliées à une application iPhone ou iPad. Celles-ci permettent de mixer de la musique électro au rythme de ses mouvements, d’ajouter des « beats », des effets qui varient selon l’amplitude de son geste… La demo de Nicolas Rasamimanana, le fondateur, a captivé le public.
Ses ventes, en France, ont décollé – même si elles restent à petite échelle. Pendant les trois premières semaines, il en a vendu 480, à 80 euros pièce. « C’était au-delà de nos espérances », confie Nicolas Rasamimanana. Il faut dire que question son, il s’y connaît : il a travaillé pendant 10 ans à l’Ircam, la Mecque de la création musicale en France. « J’utilisais ce type de technologie pour des musiciens professionnels, et l’idée, c’était de démocratiser tout cela », raconte celui qui emploie six personnes, et est en train de boucler sa première levée de fonds, et compte mettre son gadget musical sur le marché américain d’ici quelques mois.
Sur une table à coté, Bastien Sannac avait fait le voyage pour présenter Meludia, une application qui permet de développer l’oreille musicale avec différents exercices et jeux – une manière d’apprendre la musique de façon autonome. « C’est difficile pour les professeurs d’enseigner l’oreille. C’est un travail long, il faut le faire tous les jours… Pourtant, c’est quelque chose d’essentiel, et tous les musiciens qui s’éclatent ont une belle oreille », affirme-t-il.
Parmi ses clients – qui utilisent l’application sous forme gratuite ou payante – figurent des musiciens (des débutants aux experts), des écoles de musique, des universités, des conservatoires… Meludia, qui emploie 22 personnes a Paris et a levé 750 000 euros depuis sa création, vise aussi le marché américain – qui représente aujourd’hui 10% de ses utilisateurs. “On discute avec la maire de New York pour équiper les écoles de la ville”, confie-t-il.
Rendre la musique accessible à tous, c’est aussi le créneau de Jellynote. Son site, pensé en particulier pour des guitaristes autodidactes, fait défiler partitions, vous prévient si vous jouez faux, si vous n’êtes pas en rythme… Jellynote peut aussi synchroniser la partition avec une vidéo. La start-up revendique 1,3 million de visiteurs uniques mensuels sur son site.
L’année dernière, Jellynote gagné le French American Entrepreneurship Award, et depuis, Baptiste Poirier, l’un des co-fondateur, a déménagé aux Etats-Unis. Le reste de l’équipe est restée à Paris. « Au début, on était que web, et on vient de sortir les versions iPad, iphone et Android. On a eu 10 000 téléchargements sur chaque appli en 10 jours », se réjouit Adrien Cognée, 27 ans, co-fondateur. Il espère que cette montée en puissance aidera Jellynote à trouver des investisseurs américains. Qui risquent de beaucoup entendre, pendant ce salon, les mélodies des start-up françaises.