Un si petit poisson dans un vaste océan. C’est à cela que l’on pourrait comparer Lilas ( qui prend les traits de Lola Bessis, également réalisatrice), personnage principal du surprenant “Swim Little Fish Swim“, qui vient de sortir à New York et arrive à Los Angeles le 26.
Fraichement arrivée à New York tant dans l’espoir de vivre de son art que de fuir sa famille, le film suit les aventures de cette jeune femme paradoxale: à la fois indépendante et fragile, timide et audacieuse, chaque scène laisse entrevoir davantage de sa personnalité.
Toute personne ayant connu l’expérience de l’arrivée à New York, seule, ne pourra que se reconnaître dans ce film. Quand une Lilas émerveillée se promène dans les rues de la Grosse Pomme, mais aussi lorsqu’elle doute, hésite à rentrer à Paris. Comme souvent, les rencontres font les voyages, et c’est bien une rencontre, finalement, qui se révèle décisive pour elle. Par une amie commune, elle fait la connaissance de Leeward (interprété par Dustin Guy Defa). Ce papa-poule borderline, musicien de talent qui peine pourtant à s’affirmer en tant que créatif, l’hébergera dans l’appartement qu’il partage avec sa femme et sa fille de quatre ans, Rainbow.
Tous deux partagent une imagination débordante, un besoin de créer, mais aussi un blocage quant à l’idée de montrer leurs œuvres. En s’encourageant l’un l’autre à dépasser cette peur, ils développeront une relation épanouissante, et tisseront des liens forts, alors même que Lilas est se retrouve plongée de force dans les méandres administratifs.
Son visa expire, elle doit donc être exposée dans une galerie d’envergure, pour espérer décrocher le précieux sésame: un visa d’artiste. De son côté, Leeward fait face à un dilemme. Sa femme, Mary, rêve d’une vie plus conventionnelle, lui se plaît dans un mode de vie bohème, sans trop se soucier du lendemain. La caméra capte leurs divisions d’une manière sensible. Sans montrer les conflits, elle les suggère implicitement.
En filigrane se dessine la relation mère-fille. Le vernis se laisse facilement craqueler, révélant les complexités de leur relation. Lilas, jeune vidéaste, peine à se dégager de l’ombre de sa mère Françoise de Castillon, jouée par la magistrale Anne Consigny, artiste reconnue et célébrée à travers le monde. Cette mère, on la voit très peu, on la devine toujours. A la manière de Lilas, pour qui elle semble présente voire écrasante, alors même qu’elle se trouve à des milliers de kilomètres. La passion pour l’art qui les réunit, est également ce qui les sépare: comment trouver sa propre place avec un parent aussi illustre? Est-il possible d’éviter la comparaison, d’affirmer sa propre personnalité? Ces questions, si Lilas ne les prononce pas à voix haute, hantent le film dès la première seconde.
Ce sont ces interrogations, sur la relation filiale, mais aussi sur la vie d’un artiste, son rapport à ce qu’il crée, qui amènent le film à un autre niveau. Tout en restant frais et sympathique, il pousse à la réflexion. La bande originale, qui colle à merveille à l’histoire, ne gâche rien. “Out”, les sons commerciaux entendus mille fois, il s’agit ici de compositions originales qui, non sans rappeler le style de chanteurs comme Donovan Frankenreiter, sont de véritables délices pour l’oreille.
Un film maîtrisé, qui explore son sujet en profondeur, à tel point qu’il en est difficile de croire qu’il s’agit là du premier long métrage des deux réalisateurs, Lola Bessis et Ruben Amar. Laissez vous plonger dans l’univers de “Swim Little Fish Swim“, vous vous y sentirez comme un poisson dans l’eau.
0 Responses
excellent article qui donne envie d’aller voir le film.