En 2011, le photographe star français JR lançait lors d’un Ted Talk Inside Out, un projet d’art participatif et mondial pour, selon lui, « permettre de transformer les messages personnels en œuvres d’art. » Inspiré des collages grand format qu’il effectue dans les rues à travers le monde, Inside Out donne à tout photographe l’opportunité de faire passer un message qui lui tient à cœur au travers de portraits.
Cette année, la photographe Stéphanie de Rougé, qui enseigne la photographie à l’International Center of Photography (ICP) de New York, a participé au projet avec une quinzaine de ses élèves. «L’idée du projet est de prendre un sujet qui nous tient à cœur. Nous avons choisi de faire des portraits des vendeurs de rue car New York est la ville où ils sont les plus nombreux. Ils représentent aussi la diversité et l’esprit urbain de la ville ainsi que les questions d’immigration et d’insertion aux Etats-Unis », explique la photographe.
Baptisé Feeding NYC, elle a combiné ce projet avec un cours qu’elle donne à ses élèves. Son nom: “5 minute portrait”. Il consiste à prendre le portrait d’une personne en quelques instants. « Comme dans la vie… Comme les rencontres éphémères et instantanées que l’on peut avoir à New York, notamment avec les vendeurs de rue. Et puis cela me correspond. J’aime fonctionner dans l’urgence, être dans l’instant, avec un rapport instinctif à ce qui m’entoure. »
Avant d’être affichées dans les rues de New York, les photos, qui doivent suivre des spécifications techniques très précises, sont imprimées par le laboratoire new-yorkais de JR en utilisant le filtre noir et blanc qui a fait sa patte. « Le plus compliqué a été d’obtenir les autorisations pour afficher les 149 portraits ». Pas question en effet de faire de l’affichage sauvage. « Nous en avons sélectionné une vingtaine à travers la ville et obtenu l’autorisation pour trois emplacements seulement pour le moment. Mais nous continuons à démarcher et nous devrions pouvoir afficher les portraits sur de nouveaux murs d’ici la fin de l’été. »
New-Yorkaise depuis 12 ans, elle enseigne la photographie depuis 10 ans. Le New York Times l’a repérée dès son arrivée et publié son projet Broadway Mosaic sur l’immigration. Exposée au Palais de Tokyo, à la BNF à Paris ou à la Soho Photo Gallery à New York, elle a collaboré également avec des journaux comme The Guardian ou Le Monde.
Elle a également son propre studio à Williamsburg où elle propose à des photographes des ateliers tels que Off The Beaten Path. « Je les emmène dans des endroits incongrus de la ville comme l’hôpital désaffecté d’Ellis Island, le port à containers de Newark ou à la rencontre de personnages décalés et iconiques de la ville comme Bernie Wagenblast, la voix du métro new-yorkais. »
Cependant, elle se défend d’avoir un rapport particulier avec la photo à New York. « New York est une ville photogénique c’est indéniable, comme Paris, comme les villes qui sont belles, mais là n’est pas l’essentiel. Pour moi la photo vient de l’intérieur, de ce qu’on est capable de capturer et de mettre dedans, pas d’un endroit en particulier. »