Intérieur lumineux et épuré, bois clair avec quelques plantes ça et là: en pénétrant dans les locaux de Small Door à Greenwich Village, on a l’impression de débouler dans un spa ou un studio de yoga. C’est, en réalité, un cabinet de vétérinaire d’un genre nouveau.
Small Door, nom qui évoque la chatière (petite porte dans la porte utilisée par les chats), est le bébé de deux heureux propriétaires de toutous, l’Américain Josh Guttman et le Français Florent Peyre. Leur pari: révolutionner l’univers du cabinet vétérinaire en y appliquant le modèle du membership, qui s’est développé dans d’autres secteurs médicaux. “On voit ce concept mis en application dans la médecine humaine et dans le dentaire notamment. On s’est dit que c’était étonnant qu’il n’y avait rien dans le milieu vétérinaire, explique Florent Peyre. Il y a eu beaucoup d’investissements ces dernières années dans les services et les aliments pour animaux mais rien dans le domaine de la santé, alors que les cliniques sont profitables, que les vétérinaires ne sont pas très bien payés et que le marché est très dynamique et résiste aux récessions. Au vu de ces indicateurs intéressants, on s’est dit qu’il y avait quelque chose à faire“.
Les deux hommes se sont rencontrés en 2009. Florent Peyre était alors chargé du développement chez Hachette Filipacchi Media à New York et Josh Guttman travaillait pour la plateforme publicitaire Outbrain. Leurs chemins se sont croisés à nouveau après que ce dernier a rejoint la banque d’investissement SoftBank Capital. Le Parisien lui a “pitché” à plusieurs reprises la start-up qu’il avait co-fondée en 2012, Placemeter. Cette dernière, qui avait développé une technologie pour analyser des flux vidéos dans des domaines divers (transports, affichage urbain…), a été rachetée par l’américain Netgear en 2016.
“Après le rachat, je me suis demandé ce que j’allais faire“, admet Florent Peyre. Dans le même temps, son futur associé et ami allait de clinique en clinique pour faire soigner son chien malade. “Il encourrait des dépenses très élevées. Quand on comparait le montant de la dépense et la qualité du service rendu, il y avait une déconnexion“. Le duo se met alors à réfléchir à comment bousculer ce marché “très fragmenté, où 15% des 30 000 cliniques existantes sont possédées par des grands groupes, dont Nestlé (sous la marque de nourriture pour animaux Purina) et Petco“. Leur conclusion: “pour capter toute la valeur et offrir une expérience innovante, il fallait créer une chaîne. Quand on regarde Starbucks, ils n’ont pas de licence. Ils possèdent tous leurs cafés“.
En plus de permettre à Small Door de mieux contrôler ses flux de revenus, le modèle du membership “crée une friction à l’entrée“: “on n’est pas fait pour tout le monde, poursuit le Français. On veut avoir des membres qui comprennent l’intérêt de faire de la médecine préventive, qui se sentent investis dans la santé de l’animal“. En effet, Small Door, qui s’adresse aux “parents” de chiens et chats uniquement, ne fait pas de soins d’urgence. Les visites sans rendez-vous sont acceptées, mais les clients doivent devenir membres pour que leur animal bénéficie des soins.
Factures plus transparentes, service personnalisé, examens médicaux en profondeur: Small Door parie sur une qualité de service supérieure pour se distinguer de la concurrence. Le positionnement plait. La start-up a levé en avril 3,5 millions de dollars en “seed” auprès de Lerer Hippeau Ventures et Primary Venture Partners notamment. Les fondateurs se sont entourés de dirigeants d’entreprises en pointe dans leur domaine (les lunettes Warby Parker, les bars à salades Sweetgreen, les cabinets médicaux d’urgence CityMD…). Ils ont aussi soigné leur recrutement. La responsable de l’expérience-client a piloté les ouvertures de nouveaux bureaux de co-working WeWork et de salles de sport Soulcycle avant de rejoindre Small Door.
Après leur premier cabinet à Greenwich Village fin 2019, les fondateurs prévoient d’ouvrir dans l’est de Manhattan en 2020. Ils veulent se concentrer sur les villes dans un premier temps. “Les quatre-cinq prochains seront à New York, Hoboken ou Philadelphie“, précise Florent Peyre. Mais “on ne veut pas aller trop vite. Nous sommes obsédés par l’objectif de proposer un service consistant, sans hauts ni bas d’une adresse à l’autre“.