Rien ne prédisposait le Français Ludovic Collin, à devenir un entrepreneur dans la beauté – il avoue même avoir appris de nouveaux termes comme le concealer ou la CC crème dans ces 18 derniers mois, lors du développement de SkinTribe. Cet ancien ingénieur d’Oracle s’est installé aux États-Unis à la fin des années 90, mais au lieu d’aller jusqu’à l’Eldorado de la tech dans la Silicon Valley, il a décidé de poser ses valises sur la côte Est, à New York. Il est ensuite devenu un serial entrepreneur et a lancé plusieurs entreprises d’applications mobiles, avant l’explosion de ce marché avec l’avènement de l’iPhone.
Sa dernière création, SkinTribe, s’attaque au marché très convoité de la beauté. L’application permet de scanner des produits de beauté aux États-Unis et d’obtenir des notes personnalisées et recommandations des gens de sa « tribu ». Mais elle fait bien plus que ça: il s’agit d’appliquer l’intelligence artificielle à la beauté. « Avec mon cofondateur, nous avons identifié des opportunités dans le skincare. Pour nous, c’est un marché comparable à celui du vin : on entre dans un magasin et on ne sait pas quoi choisir. L’application Vivino résout le problème du choix d’un vin, nous comptons résoudre celui du choix d’un soin ». Pour cela, il s’est associé avec Matthias Grossglauser, professeur d’intelligence artificielle à Polytechnique Lausanne, et spécialiste des systèmes de recommandation.
Lors de leurs recherches préliminaires, le duo a récupéré plus de 45.000 références de produits pour la peau et leurs notes attribuées par des millions de consommatrices. « Cela nous a permis de répondre au problème du ‘cold start’. Nous allons maintenant enrichir cette base de données avec les notes des utilisatrices de l’application », explique-t-il. SkinTribe vous conseille sur le type de produits « skincare » qui vous correspond le mieux en fonction de votre profil et pour cela, chaque utilisateur répond à plusieurs questions : type de peau, âge, climat de son lieu de vie, alimentation et mode de vie, mais aussi ses habitudes de soins pour la peau. L’algorithme se charge ensuite de vous identifier par rapport aux membres de votre « tribu », des gens qui vous ressemblent, et vous conseille les produits les plus adaptés pour vous, en donnant une note appelée SkinID Score.
Cette application a vocation à répondre au besoin de plus en plus massif de personnalisation des produits de beauté. « Certaines marques qui se lancent dans des produits personnalisés, comme les shampooings Prose, vont dans le détail. Par contre, les systèmes des retailers comme ceux disponibles chez Sephora ou Ulta ne disposent pas d’autant de données que nous et n’utilisent pas d’intelligence artificielle. Nous allons dans un niveau de détail et de personnalisation unique et innovant ». L’application SkinTribe est disponible en version Beta sur les catalogues d’applications comme l’Appstore, et devrait être lancée officiellement dans les prochaines semaines.
L’entrepreneur français, qui a observé et se réjouit du succès des applications grand public comme Yuka, vise une croissance exponentielle. C’est la raison pour laquelle il a choisi le marché américain, qui compte à lui seul plus de 150 millions de consommatrices. Tout cela dans une industrie mondiale de 150 milliards de dollars, en croissance de 4 % par an. SkinTribe a vocation à devenir une marketplace : « Nous créons une place de marché basée sur l’excellence des recommandations. Le plus important pour nous est la confiance de nos utilisateurs, c’est la raison pour laquelle aucune marque ne peut acheter de recommandation chez nous ». Après avoir financé le développement de l’application sur leurs fonds propres, Ludovic Collin et son cofondateur cherchent maintenant des financements pour muscler leur équipe et lancer des campagnes digitales de l’application auprès des consommatrices américaines. L’exemple de Yuka en France est prometteur pour les fondateurs de SkinTribe : après quatre ans, l’application française compte 25 millions d’utilisateurs.