Trop longtemps associées aux mauvais postiches portés par nos grands-mères, les « prothèses capillaires », comme on les nommait honteusement autrefois, n’ont jamais eu bonne presse. Pourtant, Shani Lechan en est certaine : « La perruque est un accessoire de mode comme un autre. » Entrer dans son studio new-yorkais aux allures de salon de coiffure hollywoodien, c’est rêver de repartir avec l’une de ses crinières chatoyantes exposées au mur comme des œuvres d’art. Blondes, brunes, rousses, carré court ou à frange, ici, il y en a pour toutes les envies et toutes les têtes. Mais aussi pour toutes les raisons d’en porter.
« J’ai commencé dans ce business à Paris il y a 10 ans. En tant que membre de la communauté juive orthodoxe, je savais qu’en me mariant, j’allais devoir porter une perruque, mais je n’avais pas pour autant envie de renoncer à une jolie coupe et à un effet naturel. Je me suis formée et puis j’ai réalisé celle de ma meilleure amie pour son mariage et de plus en plus de monde est venu pour m’en commander » se souvient Shani Lechan.
En 2016, après son mariage, elle quitte Paris et s’installe à Brooklyn. Trois ans plus tard, elle lance Shani Wigs. Trois ans à économiser, trois ans à confectionner et réparer seule des perruques, trois ans de porte à porte et de travail acharné avant de lancer officiellement son entreprise. « J’ai dû faire mes preuves mais je savais que ce que je proposais était un produit de qualité, quelque chose de jamais vu, dit-elle. Mon idée, c’était de mettre la perruque en lumière, comme un accessoire de mode et qu’on sorte enfin du tabou. »
Il suffit de jeter un œil au compte Instagram Shaniwigs pour se laisser convaincre. Dans des vidéos léchées, Shani Lechan met en scène les essayages avec ses clientes. Effet waouh garanti. Loin des perruques trop épaisses, trop brillantes, trop « wiggy » comme elle dit, que l’on remarque à 100 mètres, celles de Shani Lechan sont des chefs-d’œuvre de savoir-faire, du sur-mesure de luxe, quasi indétectable pour le commun des mortels.
Et malgré leur coût élevé (entre 5.000 et 18.000$ en fonction du type de cheveux utilisés, de la longueur, de la densité), elles sont de plus en plus nombreuses à investir dans cette pièce de luxe. À l’instar de Chani Barber, 36 ans, qui réside à Miami mais n’a pas hésité longtemps avant de faire le trajet jusqu’à Crown Heights où l’atelier-studio Shani Wigs est installé. « Elle l’a placée sur ma tête et j’ai immédiatement fondu en larmes. Cette perruque, ce n’était pas que des cheveux, c’était moi. C’était une expérience bouleversante », raconte la trentenaire, qui porte une perruque pour des raisons religieuses.
Si la communauté juive orthodoxe dont Shani Lechan fait partie a été sa première clientèle, la jeune femme n’a jamais voulu s’y cantonner. « Mes clientes viennent du monde entier et maintenant, il y a autant de femmes comme moi qui portent une perruque pour des raisons religieuses que de femmes souffrant d’alopécie ou qui sont en traitement de chimiothérapie pour un cancer, souligne la jeune femme. Dans tous les cas de figure, la gratification au moment où elles essayent leur perruque est immense. » Et de se remémorer cette anecdote d’un oncologue qui s’était étonné de la chevelure encore intacte de l’une de ses patientes en pleine chimiothérapie. « Il pensait que c’était bizarre que ses cheveux ne soient pas tombés. Et pour cause, il n’avait pas remarqué que c’était une perruque ! »
C’est le secret des perruques de Shani Lechan : une personnalisation minutieuse par une équipe aux petits soins à chaque étape de leur confection : quatre personnes sur les machines à coudre, deux personnes sur les finitions à la main, un coloriste… « Tout est assemblé ici. Avec la meilleure qualité de cheveux. À la fin, au moment de l’essayage, je me charge des derniers détails comme de tirer quelques cheveux à la pince pour imiter les baby hair. Généralement, on fait une perruque de A à Z en 8 à 12 semaines » explique l’entrepreneure.
Si de plus en plus de femmes lui font confiance, les personnalités aussi ne s’y trompent pas. En septembre 2023, Naomi Campbell posait aux côtés d’autres top models des années 1990 pour le célèbre numéro spécial mode du Vogue, coiffée d’une sublime chevelure noire de jais. « Ça a été un moment culminant dans ma carrière. Une magnifique exposition pour notre travail, mais aussi une façon de dédramatiser le port d’une perruque. Pourquoi ne pas rendre ça glamour ? » interroge la jeune femme. Lily Collins avec sa coupe rock dans la pub Clash de Cartier, c’est elle aussi. Dernière en date à avoir fait confiance à Shani Wigs pour la sublimer : Kim Kardashian pour une campagne de publicité de sa marque de sous-vêtements Skims.
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« Son styliste voulait quelque chose de chic, retro, un peu Brigitte Bardot. » A-t-elle eu affaire à la uber influenceuse ? « Hélas non. Peut-être la prochaine fois. Dans mes rêves les plus fous, le hair stylist d’une série télé ferait appel à moi pour toutes ses actrices, ça, ce serait incroyable » se prend à rêver Shani Lechan. Avant de conquérir Hollywood, elle continue de prodiguer sa magie dans son salon où chaque jour, des femmes retrouvent le plaisir de se voir dans le miroir avec une chevelure de star.
Shani Wigs