En 1994, la France subjuguée découvrait l’existence de la fille cachée de François Mitterrand. Quatre années plus tard, la presse révélait aux Américains la vérité sur Bill Clinton : oui, leur président avait bien eu une relation sexuelle avec Monica Lewinsky, 21 ans. Mais le célèbre démocrate n’était pas le premier ni le dernier, sur la liste des hommes ayant entretenu des relations avec d’autres femmes que la leur. En ce mois d’élections américaines, French Morning s’intéresse à la vie cachée de ses élus.
Tout commence avec le premier Président des États-Unis, George Washington, dont la rumeur dit qu’il aurait pu avoir un enfant hors mariage… avec une esclave. L’histoire se répète avec Thomas Jefferson, troisième président américain, dont on sait qu’il a entretenu une relation sur le long terme avec Sally Hemings, une esclave également, dont il aura six enfants. Doit-on déjà en conclure que le pouvoir, lorsqu’il est entre les mains des hommes, va de pair avec leur sexualité ? Pour Doug Wead, auteur de All The President’s Children publié en 2004, la réponse est oui. « Le sexe fait partie de la vie, et la corruption est inhérente au pouvoir. Partout où il y a des hommes, ce genre de choses s’est toujours produit et se produira probablement toujours. »
Vingt ans après la publication de son livre, l’histoire lui a donné raison. Si aucune affaire n’a éclaboussé les présidences de Barack Obama et de Joe Biden (jusqu’à présent !), il en va tout autrement d’un Donald Trump et même de Bush fils. Si l’on en croit le livre de Susan Page, The Matriarch: Barbara Bush and the Making of an American Dynasty, George W. Bush aurait entretenu une relation extra-conjugale pendant dix-huit ans qui aurait tellement affecté son épouse qu’elle aurait songé au suicide. Quant à Donald Trump, marié trois fois, ce ne sont pas moins de seize femmes qui ont témoigné contre lui pour violences sexuelles ou harcèlement.
Il est tout à fait probable que l’histoire sexuelle de John Fitzgerald Kennedy, président démocrate entre 1961 et 63, ou de Bill Clinton, lui aussi démocrate, aurait été perçue différemment à notre époque post « metoo ». Le nombre de leurs liaisons semble inépuisable, sans pour autant que cela ait gêné leur carrière. Si Clinton a été condamné, c’est parce qu’il s’était parjuré. Pas parce que Juanita Broaddrick, Paula Jones, Kathleen Willey et Leslie Millwee l’ont accusé de viol. Quant à JFK, on a surtout retenu une liaison supposée et jamais prouvée avec Marylin Monroe, beaucoup plus glamour que les innombrables relations qu’il a eues avec ses secrétaires, journalistes et stagiaires, dont Mimi Beardsley, 19 ans. Qu’on se rassure cependant : Lyndon B. Johnson, président démocrate de 1963 à 1969 se vantait d’avoir eu « encore plus de maîtresses que Kennedy ».
Mais les historiens qui revisitent ces adultères doutent désormais de leur caractère « consensuel ». La « maîtresse » de Thomas Jefferson était avant tout une esclave. Difficile d’imaginer qu’elle ait eu d’autre choix que d’accepter cette situation. De même, l’enfant naturel de Grover Cleveland, président démocrate de 1893 à 1897, n’a été considéré que récemment comme le résultat d’un viol. Sa mère, pourtant, Maria Halpin avait déclaré avoir été mise enceinte : « par l’usage de la force et de la violence et sans mon consentement ».
S’il a fallu attendre Bill Clinton et l’affaire Lewinsky pour que les affairs présidentielles soient exposées au public, ce n’est pas à cause de leur prétendu secret, mais plutôt parce que la presse ne souhaitait pas en faire l’écho. Pourtant, le monde des médias savait. JFK se baignait nu dans la piscine de la Maison Blanche avec ses petites amies et il est presque certain que Jacqueline Bouvier, Madame Kennedy, était au courant de toutes ses frasques. Mais pour Barbara Perry, chercheuse au Miller Center de l’Université de Virginie, la presse se taisait, parce qu’elle était principalement masculine et qu’elle était, par là, solidaire. Par ailleurs, les médias n’avaient pas l’immédiateté que nous connaissons aujourd’hui. De nombreux Américains ignoraient par exemple que Franklin D. Roosevelt était en chaise. Ils ne recevaient pas quotidiennement dans leur flux incessant de news, les histoires sexuelles de leurs élus.
Pour terminer, une question demeurée longtemps taboue et qui fait désormais partie de celles posées sur Google : tel ou tel président était-il gay ? C’est le cas pour James Buchanan, président démocrate de 1857 à 1861 dont les historiens tentent de déterminer depuis des années si oui ou non, il l’était (mais beaucoup s’accordent en revanche pour le définir comme « pire président de l’histoire »). Récemment, une rumeur sur l’homosexualité d’Obama a surgi dans la presse à cause d’une phrase qu’il avait écrite à sa petite amie de 1982 : « Vois-tu, je fais l’amour avec des hommes tous les jours, mais dans mon imagination. »
Mais alors, s’il fallait sonder l’imaginaire de nos présidents, que diable y trouverions-nous !