Nîmoise d’origine, ayant grandi à Lyon et établie à Los Angeles depuis bientôt vingt ans, Séverine Tatangelo est, depuis dix ans, la fondatrice du studio d’architecture PCH à Venice. Autour de son équipe, elle a participé au succès de la marque d’hôtels et restaurants Nobu, dont les adresses s’invitent aujourd’hui dans les plus grandes villes du monde. Une collaboration qui lui ouvre aujourd’hui les portes de nouveaux projets d’hôtels et de résidences de luxe à l’international, et un quotidien hors du commun.
Formée à l’école d’architecture de Saint-Etienne, la jeune architecte démarre sa carrière aux États-Unis au début des années 2000. « À la fin de la cinquième année d’études, je fais la rencontre d’un architecte américain enseignant à l’USC, l’Université de Californie du Sud à Los Angeles. Seule à parler couramment l’anglais, c’est moi qui fut alors chargée de lui présenter tous les projets de notre promotion, raconte Séverine Tatangelo. Le contact est passé, j’ai conservé sa carte de visite qu’il m’avait donnée, et une fois diplômée, je l’ai recontacté pour un stage de fin d’année. En quelques jours, je recevais toutes les offres de stage du moment. »
Sur la quinzaine d’emails envoyés, une agence fait tilt. Le studio allemand Bau10, basé dans le quartier de Marina del Rey, recrute l’apprentie architecte pour 4 mois. L’obtention d’un VISA H1B quelques mois plus tard, la fait retourner à Los Angeles, cette-fois auprès de l’agence Scott Mitchell Studio. « Une signature de l’architecture résidentielle posée en plein cœur de Melrose Place, où j’ai rapidement fait ma place et officiait comme bras droit du fondateur. Une expérience riche et souvent surréelle, comme cette-fois où Barbra Streisand était venue chanter « happy birthday » à un des associés. »
En 2004, l’homme d’affaires et milliardaire américain Larry Ellison, co-fondateur de la société Oracle (spécialiste des logiciels de systèmes de gestion de données) acquiert plusieurs propriétés à Malibu et fait appel à Scott Mitchell pour gérer les projets. Au bout de quelques années, la collaboration s’essouffle et le magnat de l’immobilier se tourne vers Séverine Tatangelo, alors associée à Alexia Convers, pour poursuivre l’aventure. « Studio PCH a démarré à ce moment-là, poursuit-elle. Un nom en hommage à la Pacific Coast Highway qui mène à Malibu et fait traverser des paysages de rêve. Et une agence au site extraordinaire, directement posée à Malibu sur Carbon Beach. Finalement seule en selle, je reprends alors le projet qui deviendra quelques semaines plus tard le fameux “Nobu Malibu”. »
Fondé en 1994 par l’homme d’affaires japonais Nobuyuki Matsuhisa, associé à l’acteur Robert de Niro et le producteur américain Meir Teper, l’enseigne de restaurant Nobu connaît un premier succès retentissant à Los Angeles où sa recette de black cod au miso devient légendaire. D’autres suivront à l’instar de Londres, jusqu’au projet de restaurant à Malibu doublé d’un hôtel. « Ce restaurant était une première, confesse Séverine Tatangelo. Pour comprendre tous les enjeux, j’ai rapidement contacté le chef français de L’Ortolan sur West 3rd Street (aujourd’hui fermé), Christophe Eme, lui ai expliqué le sens de ma demande et me suis fait embauchée tous les samedis en cuisine. Une clé pour décrypter la façon dont fonctionne la vie d’une cuisine. »
Dès 2010, la construction de Nobu se lance, un challenge colossal lié à une construction sur un site géographique sensible (en bord d’océan), à la technique spectaculaire, et impliquant une étroite collaboration avec les autorités locales. « Une expérience humaine incroyable, reconnait Séverine Tatangelo. La preuve que l’énergie collective, celle des équipes de Nobu dirigée par Meir Teper, et Studio PCH et ses consultants, peut faire réussir des projets hors-norme, et qu’un peu de cultures et de traditions – le rituel du gigot-bitume qui ponctue les soirées chantier, et la dégustation du lapin ! – peuvent avoir du bon ».
En juillet 2012, le restaurant Nobu ouvre officiellement à Malibu. Face à la plage, le restaurant à l’architecture minimale et inspirée du Japon, aux larges volumes, doté d’une terrasse et couvert d’une palette de bois précieux, devient en quelques jours la table des célébrités d’Hollywood, mélange d’entrepreneurs, rappeurs et foules branchées. Un modèle pour la marque Nobu qui décide d’en faire son flagship.
Après l’ouverture du Ryokan Nobu en 2017, un sanctuaire intimiste de 16 suites, où les premiers tarifs s’affichent à 2000 dollars la nuit, le studio PCH migre finalement dans le quartier de Venice, au coeur de l’action angeleno. Studio PCH réunit aujourd’hui une vingtaine de collaborateurs, quelques Français à l’image du Directeur Créatif, Jean Posulski, et beaucoup de nationalités différentes « à l’image du cosmopolitisme de Los Angeles », tous dédiés à des projets de restaurants, d’hôtels et résidences privées à la fois aux États-Unis, en Polynésie à Bora-Bora, dans l’archipel des Bermudes, dans celle des Îles Turks et Caïques, à Paris ou New York… des destinations que l’architecte parcourt toute l’année.
« Le succès de Nobu a largement contribué à lancer l’agence, conclut Séverine Tatangelo, et notre touche française y a, sans doute, participé. Le monde entier reste fasciné par la France, par le bon goût, l’art de vivre français, par notre esprit rebelle aussi, grincheux parfois, notre force de production et notre liberté. Tous les 15 jours, nous pratiquons la semaine des 4 jours et proposons les vendredis non travaillés, des rendez-vous culturels pour continuer à s’inspirer de l’art, de l’architecture, de l’air du temps, et rester en éveil. Avoir un temps d’avance, voilà ce qui me guide. »