Donald Trump et Emmanuel Macron se retrouvent du 24 au 26 août à Biarritz pour le sommet du G7 sur fond de tensions commerciales. Alors que la France s’est mise à taxer les géants du numérique américains via la nouvelle “taxe GAFA” (Google, Apple, Facebook, Amazon), les Etats-Unis agitent le spectre de barrières tarifaires sur les importations de vins français. Cela ne serait pas une grande perte pour Donald Trump. Il a dit dans un tweet fin juillet que “le vin américain était meilleur que le vin français“.
Même s’il a acheté un établissement vinicole en Virginie avant d’arriver à la Maison-Blanche, le président américain n’est pas un grand amateur de vin – il n’en boit pas – mais a-t-il raison de dire que le vin français est moins bon ? La comparaison donne des boutons aux professionnels. “Ça n’a pas vraiment de sens de comparer les deux. C’est une simplification hâtive !, tranche Pascaline Lepeltier, sacrée meilleur sommelier de France en 2018 et associée au sein du restaurant new-yorkais Racines. “On ne peut pas comparer un pays qui a des centaines de siècles de culture du vin avec un pays jeune qui a un vrai potentiel. La France a une culture viticole qui s’est enracinée depuis des siècles. C’est un leader mondial qui est un modèle pour d’autres pays, comme les Etats-Unis“.
Même verdict pour Eddy Le Garrec, propriétaire de la boutique Empire State of Wine à Manhattan, qui rappelle que faire de grandes comparaisons n’a pas de sens tant le vin est une expérience subjective. “Les Américains ont été élevés dans le sucre. On ne peut pas changer cette éducation. Pour eux, l’amertume et l’acidité sont négatives, ce qui n’est pas le cas pour les Européens. Un Bourgogne sera souvent trop acide pour les palais américains”, explique le caviste, pour lequel aucun vin n’est “meilleur ou moins bon. Ils sont complémentaires“.
On peut aussi se demander ce que signifient “vins français” et “vins américains“, tant les régions viticoles sont variées dans les deux pays. Selon Eddy Le Garrec, par “vin américain“, on entend surtout “vins californiens” – 89% de la production américaine provient du Golden State. Ceux-ci ont été mis sur le devant de la scène par le fameux “Jugement de Paris” de 1976. Lors de cette dégustation à l’aveugle de vins californiens et français organisée par un vendeur britannique, les vins de Californie ont obtenu les meilleures notes dans les catégories en compétition (vins rouges, chardonnay).
“Comparer les vins américains et français ne veut rien dire, car ils ont chacun leur propre personnalité. En France, nous avons des vignobles jusqu’en Alsace et une très grande diversité. Aux Etats-Unis, même si la Napa Valley commence à s’identifier aux Bordeaux, ce sont en réalité des vins très différents, estime Stephan Asseo, vigneron et fondateur de L’Aventure Winery à Paso Robles en Californie. Le vin américain connait une forte progression des vignobles et du savoir-faire et ce n’est que le début. Il existe désormais des vignobles dans 30 Etats aux Etats-Unis, même si la Californie possède la part du lion“.
Opposer vins français et vin américains a encore mois de sens au vu des échanges qui existent entre les deux pays dans ce domaine. “Les Etats-Unis se nourrissent de la France et vice versa. Il y a une belle dynamique entre les producteurs de vins de haute qualité. Les Français vont étudier à UC Davis (l’université reconnue pour ses formations dans le domaine du vin, ndr) en Californie et les Américains viennent en France pour apprendre des techniques“, poursuit Pascaline Lepeltier.
L’Oregon, dont le climat tempéré est proche de celui de la Bourgogne, est devenu en quelques années la terre promise de nombreux producteurs provenant de la région française, dont la Maison Joseph Drouin. Pour son Domaine Drouhin Oregon, elle a trouvé un slogan qui traduit bien le mélange des cultures: “French Soul, Oregon Soil“.
Avec Marie Demeulenaere (Washington)
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