Autrefois réservé à une clientèle caricaturale fan de breuvages « glouglou » au goût de poussière et effluves de poney, le vin nature est aujourd’hui un phénomène qui va au-delà d’une simple mode pour bobo citadin. Qu’appelle-t-on « vin nature » ? « L’écrivaine Alice Feiring, référence en la matière a défini le vin nature comme un vin dans lequel “nothing is added, nothing is taken away” » rappelle Pascaline Lepeltier, sommelière du restaurant Chambers à TriBeca, élue meilleure sommelière de France en 2018 et arrivée quatrième au concours du meilleur sommelier du monde à Paris.
Ce postulat suffit-il à faire d’un jus un bon vin ? Certainement pas. « Le problème avec le vin nature, c’est qu’il n’y a aucune législation qui l’encadre, souligne Pascaline Lepeltier. Seule une association française, Vin Méthode Nature, s’est dotée d’un véritable cahier des charges validé par les instances officielles françaises avec un logo pour garantir la qualité des breuvages et une véritable démarche éthique de A à Z : vignes bio, récolte à la main, avec des règles précises sur la vinification dont l’utilisation du dioxyde de soufre. »
En effet, certains malins, attirés par le succès marketing de cet OVNI (Objet Viticole Non Identifié), se sont engouffrés dans la brèche et labellisent leur vin « nature » quand ils se contentent d’éviter l’ajout de soufre mais continuent d’utiliser des vignes traitées avec des pesticides ou venant de l’agriculture conventionnelle. « Pour faire la différence entre un vigneron soucieux de partager son terroir d’une démarche purement commerciale, il faut se renseigner en amont de l’achat. Il y a de nombreux ouvrages sur la question comme ceux de Isabelle Legeron et Aaron Ayscough. Également la newsletter et les livres d’Alice Feiring et l’application Raisin », précise la sommelière. Autre solution ? Faire confiance à un caviste. « Son expertise est essentielle. En voyage, je suis mon intuition, je regarde les étiquettes sur les rayons, elles sont souvent plus originales que les bouteilles proposées dans des caves classiques. Il faut poser des questions, voir si la personne connaît l’histoire derrière les flacons. Et surtout un bon caviste nature ne fait que du nature ! », explique Zev Rovine de Zev Rovine Sélections, importateur de vins natures aux États-Unis.
La boutique sur laquelle nos experts sont unanimes. Une cave qui donne soif, menée goulot battant depuis 2005 par le Français Jean-Baptiste Humbert qui propose une sélection éclectique de petits producteurs engagés. « En ce moment, j’ai environ 1200 références, 80% en vin nature. Comment je les sélectionne ? En goûtant ! Beaucoup. Je ne suis pas un extrémiste du vin nature, c’est-à-dire que je m’attache à ce qu’il y ait une vraie démarche écologique mais si un jus me plaît et qu’il y a une dose acceptable de sulfites, j’y vais quand même ».
On opte pour : un vin d’Autriche, Maria & Sepp Muster Erde 2021, 88,99$. Wine Therapy, 171 Elizabeth St, New York – (212) 625-2999
« Le plus important pour moi dans une boutique ? L’expérience d’achat, explique Vladimir Ocokoljic-Coja, propriétaire du restaurant Kafana qui fut l’un des premiers à mettre du vin nature à sa carte. Je préfère qu’il y ait peu sur les étagères et que la personne aux commandes me raconte l’histoire des vignerons, qu’il s’intéresse à mes goûts et me fasse découvrir quelque chose ». Bingo ! C’est le cas chez Discovery Wines. « Ils ont l’une des sélections de vin du Jura la plus importante. Et quand on aime le vin nature, on sait que c’est là-bas que tout se passe en ce moment », confirme Ryan du compte Instagram @SuperVinoBros.
On opte pour : un Bourgogne aligoté, domaine François Mikulski, 48,60$ ou un Chardonnay Domaine Tissot “Patchwork”, 44$. Discovery Wines, 16 Avenue B, New York – (212) 674-7833
« C’est une cave pionnière engagée dans cette mouvance avec une équipe qui va régulièrement à la rencontre des producteurs. Ils ont donc une réelle connaissance de terrain et pratiquent de très bon tarifs. Ce que j’aime bien avec eux également, c’est qu’ils prennent des risques, ils importent eux-mêmes des vins qui ne sont pas encore présents aux États-Unis. On y trouve des vins uniques », affirme Pascaline Lepeltier.
On opte pour : le champagne nature André Beaufort Réserve Brut, 55,99$. Chambers Street Wines, 79 Chambers Street, New York.
Andrew Tarlow, restaurateur à Brooklyn, et Dennis « DJ » McNany, musicien et amateur de vin naturel, se sont associés pour créer Stranger Wines, une boutique de vins naturels et biologiques au cœur de Williamsburg. Ils prennent soin de sélectionner des vins auprès de petits producteurs durables du monde entier, offrant une sélection toujours évolutive et intéressante.
On opte pour : un PetNat Rosé, Anders Frederik Steen, 38$. Stranger Wine & Spirits, 132 Havemeyer St, Brooklyn – (718) 337-8035
Une véritable caverne d’Ali Jaja dans laquelle Henry Glucroft officie depuis 2013. « J’ai ouvert après avoir constaté qu’il y avait un vrai manque dans le quartier, dit-il. Mon idée c’était de proposer uniquement des vins et sprititueux natures de petites productions, des choses que vous ne pouvez pas trouver ailleurs ». Zev Rovine confirme : « Il y a ici des pépites du Jura, une région extrêmement dynamique ces dernieères années en vin nature avec des artisans vignerons exceptionnels comme Alice Bouvot ».
On opte pour : Côtes de Roussillon, Fernand Vaquer (1985) à 69$ ou Domaine de L’octavin, Le Roi des Cépages (2021), 54,99$ . Henry, 69 Central Ave, Brooklyn – (347) 435-0070
À mi-chemin entre la cave à vins et la boutique de disques vintage, Vinyl multiplie les bonnes ondes pour vous en mettre plein les sens. C’est aussi l’un des shops préférés des frères du compte @SuperVinoBros. « C’est vraiment la boutique hidden gem du quartier. Le propriétaire a un goût sûr même si sa sélection est plutôt modeste. Je lui fais confiance les yeux fermés quand j’y vais. »
On opte pour : Un Riesling, Stein ‘Palmberg’ Kabinett Trocken Alte Reben, 49,99$. Vinyl Wine, 1491 Lexington Ave, New York.