Après une presse mirifique pour Sarkozy le-nouveau-leader-de-l’Europe, le vent tourne dans les médias américains. Sa capacité à construire un front européen uni face à la crise est aujourd’hui remise en doute. Dans le cadre des réunions préparatoires pour le sommet économique du 15 novembre, qui se veut un “Bretton Woods II”, The Christian Science Monitor souligne que l’attitude de la France commence à s’attirer les foudres de ses voisins européens, et en premier lieu celles de l’Allemagne. Nicolas Sarkozy continue en effet de soutenir des mesures auxquelles s’est violemment opposée la chancelière allemande, qui menace de répondre par un blocage du processus des réformes.
Deux autres initiatives françaises sont également contestées par certains pays qui craignent un coup d’état sarkozyste: prolonger de six mois la présidence de Nicolas Sarkozy à la tête de l’Union Européenne, et placer des français aux postes clés de la Banque Centrale Européenne. Le New York Times insinue que l’hyperactivité du président français devient désormais contre-productive. Sarkozy aurait-il les yeux plus gros que le ventre? A proposer chaque jour de nouvelles mesures, il risque de décevoir pour toutes celles qu’il ne pourra pas réaliser. Et à privilégier la quantité et la rapidité sur la réflexion, il multiplie le risque d’erreur. Le journaliste du Christian Science Monitor rappelle ainsi qu’avec son projet de Bretton Woods le 15 novembre, il a surement vu trop grand étant donné le manque d’unité interne de la scène européenne et le scepticisme d’acteurs majeurs tel que les États-Unis ou la Chine. Le Wall Street Journal du 30 octobre conclue: “Not-so-super Sarkozy“.
Au milieu de cette effervescence économique et européenne, ce dernier a également trouvé le temps de soulever une controverse diplomatique, à la une de l’édition Poligazette du 28 octobre. Sarkozy aurait déclaré à l’abri des caméras, en début de semaine dernière, que les propositions de Barack Obama en matière de politique étrangère étaient des “formules vides de sens” et “immatures“, en référence à la volonté du candidat démocrate de rencontrer Mahmoud Ahmadinejad sans préconditions.
Dans Newsmax du 29 octobre, David Pattern reprend l’affaire et explique que le président français craint que l’attitude américaine à l’égard de l’Iran ne s’adoucisse si Obama est élu, alors qu’il est lui-même à la tête d’une coalition de nations qui prône la ligne dure contre le programme nucléaire iranien. Mais surtout, Obama risque de remettre en cause ce front commun contre l’Iran, et le rôle de la France au sein de ce dernier, si il engage des négociations unilatérales avec l’Iran. La Poligazette comprend les inquiétudes de Nicolas Sarkozy, et les qualifie de “logiques” et “prudentes”.
Logiques et prudents, les services consulaires français le sont tout aussi, puisque dès le lendemain, ils ont démenti ces propos attribués à Sarkozy. Un communiqué de presse hautement diplomatique à la veille d’une élection ou Barack Obama a toutes les chances d’être élu….
Malgré cet éventuel désaccord de politique étrangère, Sarkozy et Obama seraient bien plus proches idéologiquement que l’on ne pourrait le croire, selon un article intitulé “Our first French president?” et publié dans un journal conservateur, HumanEvents. Pour le journaliste, le problème avec Obama n’est pas tant lié à sa race ou son ethnie qu’à son identité culturelle, proche de la mentalité française. Par exemple, le candidat démocrate propose un “day-off” le jour des élections -un jour férié comme on dit chez nous. Abération s’exclame Jed Babbin, cela signifie 22,3 milliards de pertes économiques! Apparemment, en France nous n’avons pas ce genre de considérations puisque nous avons les 35 heures, ponctuées de grèves et de cinq semaines de vacances. Mais aux États-Unis, eux, ils travaillent. Et c’est dans leur culture, qui n’est pas celle de M. Obama donc. Effectivement, puisque ce dernier est en réalité un adepte du socialisme à l’européenne, c’est-à-dire un mélange de progressisme débridé, de redistribution et d’atteinte aux libertés personnelles et à la libre-entreprise. Jed Babbin explique ainsi que la constitution française plairait surement bien plus au candidat démocrate que celle de son propre pays, puisque l’interventionnisme de l’Etat y est inscrit. Il enfonce le clou quelques lignes plus bas en ajoutant que Obama est en réalité “génétiquement français“. Et il faut croire que c’est une tare irrémédiable. Pauvres de nous!
Pour les anti-français, une autre preuve de l’incompétence française est aussi à rechercher du coté de Dominique Strauss-Kahn au FMI. Bien malgré lui, il est venu conforter l’image du français coureurs de jupon par sa liaison avec une de ses subordonnées. Heureusement, le mot de la fin est arrivé, puisque abus de pouvoir il n’y a pas eu. Un article du Washington Post titre ainsi sur le soulagement de la France et des français. Selon Edward Cody, toute la classe politique française était unanimement inquiète que cette affaire aurait pu salir l’honneur de la France à l’étranger, et a fait bloc derrière DSK. Certains y ont vu une tentative volontaire des américains pour déstabiliser le leader socialiste à la tête du FMI. Et personne, à l’intérieur de cette dernière, n’a omis de railler la pudibonderie américaine, soulignant qu’en France une telle histoire n’aurait jamais éclatée.
Pourtant, si les Français ont moqué l’Amérique prude, ils seraient en fait plus coincés qu’ils ne veulent bien l’admettre selon Elaine Sciolino dans le New York Times. Le prétexte de son article est la sortie cette semaine en France du film “Cliente” de Josianne Balasko, avec Nathalie Baye dans le rôle du personnage principal, une femme d’âge mur qui paie pour du sexe. La réalisatrice explique par ce film vouloir lever un tabou, à savoir celui du plaisir féminin. La journaliste la reprend et explique que si la France est traditionnellement moins torturée dans son rapport à la sexualité que les États-Unis, de nombreuses frontières restent à transgresser. Le pays se trouve justement à un moment clé ou la question de la place du sexe dans la société et celle du respect de la vie sexuelle des célébrités sont posées. Pour Elaine Sciolino, les choses ont commencé à changer avec l’exposition de la vie privée de Nicolas et Carla Sarkozy, ou celle de la grossesse de Rachida Dati. Elle note aussi plus d’articles sur la sexualité des femmes dans les journaux, et une promotion des films pornographiques réalisés par ou pour des femmes. Néanmoins, la société française reste confrontée à un paradoxe de taille, entre sa volonté d’être ouverte sur la question du sexe d’un coté, et de l’autre, vouloir garder la chose secrète et privée. Porter un jugement sans être fermé d’esprit, telle est l’ambiguïté des français face à leur sexualité.