La retraite attendra. Il y a un an, Jean-Louis et Karen Dumonet devaient s’acheter une propriété quelque part en bord de mer et ouvrir un bed & breakfast pour profiter des vieux jours tranquillement.
C’était sans compter l’intervention d’un ami qui leur parle d’un local à vendre sur Smith Street, l’artère commerçante du quartier de Carroll Gardens surnommé “Little Paris”. “Jean-Louis m’a vendu le morceau en disant qu’on avait plus d’énergie maintenant, qu’on avait déjà tous les fournisseurs sur place pour trouver les bons produits…” se souvient Karen Dumonet. Leur restaurant, nommé simplement Dumonet, voit le jour il y a six mois. “En voyant l’espace, je me suis dit que ça allait marcher. C’est un beau quartier“, glisse Jean-Louis Dumonet.
Le couple de restaurateurs, qui a fait ses armes dans des hôtels et restaurants de renom, en salle comme aux fourneaux, n’en est pas à son coup d’essai. Le Poitevin et l’Ecossaise, qui ne se sont plus quittés depuis l’école hôtelière Jean Drouant à Paris, ont ouvert ensemble Restaurant Jean-Louis Dumonet à Chateauroux (Indre) en 1987. L’aventure dure quatre ans. “Mitterrand avait décidé de taxer les repas d’affaires. On a perdu 60% de notre chiffre d’affaires du jour au lendemain. Ça nous a cassé le restaurant“, se souvient le chef.
Encouragé par deux amis qui voulaient monter un restaurant, le tandem vient s’installer à New York. “On a pris les deux enfants, deux valises, ma boite de couteaux et mes vestes de cuisine et on est parti“.
Sur place, Jean-Louis Dumonet s’associe à ses deux amis pour ouvrir le bistrot Trois-Jean. Mais Karen Dumonet, qui travaillait aussi dans cet établissement de l’Upper East Side, doit s’en éloigner à cause d’un accident. Alors qu’elle part explorer d’autres horizons – l’associatif et l’humanitaire -, Jean-Louis Dumonet poursuit son chemin aux commandes de cuisines new-yorkaises (Palladin au Time Hotel dès 2000, puis le Carlyle, Saks Fifth Avenue et le club privé Union Club, où il arrive en 2008).
Dumonet leur re-donne enfin la possibilité d’avoir leur propre affaire, plus de trente après leur première aventure commune dans la restauration. Avec lui aux fourneaux et elle en salle, ils reproduisent le modèle des parents de Jean-Louis Dumonet: son père et sa mère ont géré plusieurs établissements à Paris (Joséphine et La Rôtisserie) et une auberge dans la petite commune de Lussac-les-Chateaux sur la Vienne.
Dans l’espace de 58 places, où l’on est accueilli par un long comptoir en bois qui appartenait au restaurant sicilien qui l’a précédé, on sert quelques grands classiques de la cuisine française. Le menu du moment pour le dîner compte du cassoulet, de la tarte flambée, du navarin d’agneau et du foie gras au torchon. “Ce sont des choses qu’on faisait chez mon père et que je voulais refaire, explique chef Dumonet. Il y a très peu d’ingrédients mais ce sont de bonnes choses“.
Le restaurant n’est ouvert que pour le dîner en semaine et le brunch le week-end pour coller aux habitudes de ce quartier très résidentiel. “Le bâtiment a été construit en 1948. Depuis, un restaurant italien et un sicilien se sont succédés ici. Si les deux ont pu survivre, c’est qu’il y avait une habitude, une volonté de venir là. Il y avait une place pour nous“, raconte Karen Dumonet.
Six mois après l’ouverture, ne regrettent-ils pas d’avoir renoncé à la simplicité d’un bed & breakfast ? “Ca sera pour la deuxième retraite“, plaisante Jean-Louis Dumonet.