Socrate était d’une laideur proverbiale, Kant d’une pâleur maladive, Bergson faisait notaire de province et Sartre louchait.
Le moins que l’on puisse dire de Raphaël Enthoven, philosophe lui aussi, c’est qu’à rebours, il a plutôt été avantagé par la nature, avec son physique de sportif et ses traits séduisants. Secondaire ? Certes, mais cependant indicatif : il s’attache beaucoup, dans son oeuvre, à l’esthétique, au visible, davantage qu’à la métaphysique.
Moraliste, notamment par le biais de ses allègres chroniques radiophoniques, il croque le monde contemporain un peu à la manière d’un Roland Barthes, sans négliger d’aborder à bras le corps des créateurs de pleine envergure, tels Marcel Proust et tout récemment Vermeer.
Il ne se prend nullement pour un théoricien de l’être, du temps ou du néant, il est de ces esprits tellement français qui s’enchantent à mêler littérature et philosophie, tels Rousseau et plus encore Diderot, ou Alain. Au reste, l’un de ses auteurs préférés n’est-il pas Sacha Guitry l’enchanteur, en qui Raphaël Enthoven a su déceler une authentique profondeur ? Quoi de plus perspicace que cette remarque que le dramaturge place dans la bouche de l’un de ses personnages qui attend sa maîtresse : “Elle est en retard, c’est donc qu’elle va venir” ?
par Olivier Barrot