(Revue de presse) Le remaniement intrigue. Manuel Valls, Ségolène Royal, Arnaud Montebourg, à chacun sa cible… Entre inquiétudes politiques et potins, les commentaires vont bon train dans la presse américaine cette semaine.
The New Yorker brosse un portrait pour le moins flatteur du nouveau Premier Ministre français et tacle, au passage l”ensemble de la classe politique française. Adam Gopnik semble emballé par celui qu’il décrit comme “un gars impressionnant -plutôt inhabituel, pour un homme politique français, ou un politicien, d’ailleurs. Il est féroce, intelligent, sans compromis, parle franchement, même si il est un peu dénué d’humour”.
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Manuel Valls apparaît comme l’exception dans un monde politique caractérisé depuis trop longtemps par les non-dits et les egos démesurés. “Il manque du bon sens de Sarkozy, mais aussi de sa vanité, pour ne pas mentionner les sombres profondeurs d’un Mitterrand ou le cynisme d’un Chirac. Il n’a pas non plus cultivé l’élocution évasive et suave propre au charme mondain, qui caractérise les politiciens français classiques”.
Mais ce que semble apprécier plus que tout Adam Gopnik, c’est l’ambition affichée de Manuel Valls. Selon le journaliste, les jours s’annoncent palpitants : “Lorsque le Président et le Premier ministre sont du même parti, les choses peuvent être encore pire, parce que le premier ministre, si il remplit sa tâche, est immédiatement présenté comme un rival pour la présidence. Le Président souhaite donc quelqu’un qui est impeccablement fidèle”. Or, Manuel Valls est “un homme qui s’intéresse ouvertement et sans vergogne à la présidence”.
Le retour de « Ségolène »
Et dans le gouvernement de Manuel Valls, il y a des surprises, au premier rang desquelles le retour de Ségolène Royal au poste de ministre de l’écologie. “L’ancienne compagne de François Hollande au gouvernement” titre le Washington Post qui consacre la presque totalité de son article à l’ancien couple Hollande/Royal.
“Face à la réaction violente des électeurs dans les urnes, le président français François Hollande cherche à relancer sa présidence pulvérisée à l’aide d’une arme surprenante : Ségolène Royal, la mère de ses quatre enfants”.
Comme si leur passé en commun ne suffisait pas, le journal rend l’arrivée de Royal au gouvernement encore plus croustillante en rappelant qu’“après la victoire présidentielle de François Hollande en 2012, Trierweiler s’est dit opposée à voir Royal, sa rivale romantique, entrer dans le nouveau gouvernement”.
Au cas où le message n’aurait pas été assez clair, le journal insiste : “Royal et Hollande se rencontreront chaque semaine en conseil des ministres”. Voilà qui est dit.
Que va faire Montebourg ?
Le Wall Street Journal concerné ou consterné ? Une chose est sûre, c’est sur le versant économique que se concentrent leurs interrogations. Dans un premier article, le journal rappelle avec sérieux les défis que le nouveau gouvernement va devoir relever : “La nouvelle équipe sera confrontée à un triple défi basé sur les promesses de M. Hollande : relancer la croissance économique grâce à des réductions d’impôts, inverser la hausse continue du chômage et reconquérir les électeurs de gauche mécontents”.
La montée en puissance d’Arnaud Montebourg n’est pas vue d’un très bon œil par le quotidien qui grince des dents : “Pour montrer qu’il avait besoin que les gens de gauche se rallient à lui, M. Hollande a gardé le ministre de l’Industrie Arnaud Montebourg, un critique virulent des politiques d’austérité, qui a même vu sa mission s’élargir “.
Dans un second article, le journaliste Simon Nixon adopte un point de vue résolument pessimiste: “Le Président François Hollande a fondé sa carrière politique sur sa capacité à forger un consensus. Mais ses efforts pour en trouver un n’ont pas livré les résultats économiques ou politiques attendus”. En d’autres termes, si il a échoué par le passé, il n’y a pas de raison qu’il réussisse cette fois. D’autant que le Président français semble être complètement à côté de la plaque : “les efforts pour maintenir l’harmonie sur le plan domestique mèneront à un affrontement avec la Commission européenne et d’autres gouvernements de la zone euro sur les objectifs budgétaires de la France”. Et le quotidien de conclure : “M. Hollande pourrait bientôt se rendre compte que le consensus n’est plus une option”.
TechCrunch, le site de la high-tech, est dubitatif face à la sélection d’Arnaud Montebourg, décrit comme “la personne qui a bloqué le rachat de Dailymotion par Yahoo!” Et de noter au passage les manifestations de soutien de plusieurs entrepreneurs à Fleur Pellerin, la ministre chargée du Numérique que Montebourg a remplacé. “Après un début difficile, elle avait fait du bon boulot“, estime le site. “Surtout, elle comprenait comment marchaient les start-up“. “Une fois de plus, ce remaniement est symptomatique d’une dichotomie entre innovation et pouvoir en France. Une jeune génération d’entrepreneurs débrouillards essaie de faire bouger les lignes dans les industries existantes (…) De l’autre côté, il y a les hommes et les femmes en politiques, les PDG des plus grandes compagnies françaises et les personnes en charge de l’administration. La plupart viennent des mêmes écoles, comme l’ENA.” La remaniement est-il un pas en arrière?