“Ce n’est pas la partie de mon travail que je préfère, mais je dois le faire“. C’est le lot des chefs-stars. Daniel Boulud est de nouveau en tournée promotionnelle. New York, Milwaukee, Los Angeles, San Francisco: il ne ménage pas sa peine pour vendre son dernier livre de recettes, Daniel: My French Cuisine.
C’est son cinquième pour être précis, vingt ans après son premier, Cooking with Daniel Boulud. Et vingt ans après l’ouverture du désormais légendaire Restaurant Daniel dans l’Upper East Side de Manhattan. “Une coïncidence, précise-t-il. Les autres livres de recettes étaient écrits avec l’idée de cuisiner à la maison, de faire de recettes simplifiées. Ce livre n’est pas à la gloire de Daniel Boulud, mais à la gloire du Restaurant Daniel“, dit-il.
Au gré des 400 pages, co-écrites avec la journaliste Sylvie Bigar (par ailleurs collaboratrice de French Morning) et agrémentées de 125 superbes photos de Thomas Schauer, le cuisinier détaille les recettes qui ont régalé ses clients ces trois dernières années. Elles ont été choisies de manière aléatoire: son porcelet aux cinq épices côtoie ainsi le duo de bœuf, la caille aux raisins, l’escalope viennoise et le mille-feuille aux pommes. Il y évoque aussi des plats issus de ses régions françaises préférées et qu’il cuisine pour ses amis et sa famille. En bonne place, les spécialités de Lyon, vivier à grands chefs, où Daniel Boulud a fait ses armes. Le poulet au vinaigre à l’estragon, son premier plat en tant qu’apprenti au restaurant lyonnais Nandron, figure en bonne place.
Outre les recettes qui ont valu à Daniel quatre étoiles au New York Times – il en a perdu une en juillet – et trois au Michelin, l’ouvrage préfacé par son mentor Paul Bocuse raconte la cuisine selon Boulud. Il y signe dix essais sur le vin, la viande, le pain ou encore les truffes. Dans ce dernier, on apprend notamment qu’il lui est arrivé de débourser “le prix d’une petite voiture“, soit « entre 12.000 et 14.000 dollars », pour acquérir le précieux champignon.
Pour les lecteurs intéressés par les coulisses de Daniel, le clou du livre sera sans doute le texte du journaliste américain Bill Buford, que Daniel Boulud a invité dans sa cuisine. Le critique culinaire, qui a assisté ébahi à la préparation d’un coulibiac, pâté en croute à base de poisson et de légumes, et d’une tête de veau en tortue, raconte la colère de Daniel autour d’un pot-au-feu mal préparé. “Sorry, it’s shit no?” s’excuse le chef auprès de son invité un brin décontenancé par sa gêne. “Avec le temps, je ne suis pas moins exigeant, raconte Daniel Boulud. Hier, j’étais tout aussi exigeant mais seul. Aujourd’hui, je le suis toujours mais mieux entouré.“
S’entourer, une nécessité pour le chef, propriétaire de quatorze restaurants dans le monde, dont sept à New York, habitué des plateaux télé et des galas. Un livre de recettes alors qu’il est de moins en moins aux fourneaux, un peu paradoxal? Il balaie la remarque d’un revers de main. “J’ai des amis qui n’ont qu’un seul restaurant et qui passent moins de temps en cuisine que moi. Sur 80 heures de travail, j’y passe bien plus de la moitié de mon temps“. Il faudra donc à ses lecteurs un peu d’entrainement pour réussir le clafouti à la lavande.
Credit photo: Daniel Boulud au DB Lounge / T. Schauer