C’est une oasis de verdure située au sud du Bronx entre l’Est d’Harlem et la pointe Ouest de Queens. Si sa voisine Rikers Island accueille une prison, Randall fait dans les terrains de sport avec plus de 208 hectares dédiés à la pratique du foot US, du baseball, du hockey sur gazon et surtout du football. L’île regroupe la bagatelle de 32 rectangles verts qui font chaque jour le bonheur des écoles de foot, des clubs et des joueurs du dimanche. Mais comment Randall’s Island est-elle devenue l’épicentre de la pratique du foot à New York?
Le passé glorieux du New York Cosmos
L’histoire de l’île est intimement liée à celle du New York Cosmos, l’un des premiers clubs à avoir démocratisé le football dans la Big Apple et aux Etats-Unis. Fondé en 1971 par Warner Media, le Cosmos va mettre en place la première équipe « internationale » de football, en recrutant notamment en 1975 le meilleur joueur du monde de l’époque, le Brésilien Pelé. Avant tout passionnés de football américain, de basketball et de baseball, les Américains commencent alors à s’intéresser au “soccer”, en suivant avec un intérêt grandissant la ligue nationale de l’époque, la NASL. A la recherche d’un stade pouvant accueillir 20 000 fans, le club new-yorkais va déménager au Downing Stadium en 1974, un stade omnisports de Randall’s Island. En juin 1975, Pelé fait ses grands débuts avec le Cosmos sur la pelouse délabrée et en partie repeinte en vert du Downing Stadium puisque le match se joue devant les caméras de la chaîne CBS. Si le club regagnera ensuite le Yankee Stadium en 1976, il aura ouvert la voie à d’autres équipes professionnelles dont la dernière, le New York Centaurs, a joué au Downing Stadium de 1994 à 1996. Ce terrain omnisports a depuis été détruit et remplacé en 2002 par un stade plus petit et plus moderne, l’Icahn Stadium.
Le “soccer” en plein développement à New York
Le New York Cosmos n’est pas le seul avoir démocratisé le football à New York. La Coupe du monde 1994 a également contribué à l’essor du sport aux États-Unis, avant que la MLS prenne le relais à partir de 1995. La Big Apple est également une ville d’immigration. Un tiers de la population est hispanique, originaire de pays d’Amérique latine où le football est le sport numéro un. Au niveau national, le foot est devenu le deuxième sport préféré des jeunes Américains juste derrière le foot US, selon l’étude du cabinet Morning Consult. La progression du foot aux Etat-Unis attirent les plus grands clubs européens, qui ouvrent de plus en plus d’académies qui accueillent des jeunes de 5 à 17 ans. A New York, l’AS Roma a récemment ouvert son école de foot après la Juventus, le FC Barcelone, Valence, le Paris Saint-Germain et la Fédération Française de Football. Tous ces clubs se partagent chaque semaine les nombreux terrains de Randall’s Island. Ils y organisent des “after school” pour une première initiation au ballon rond après l’école, des “camps” ou stages de foot organisés sur plusieurs jours, et mettent en place des “travel teams” pour une pratique plus intensive avec entraînements et matches réguliers.
Un manque d’infrastructures dans la ville
Si Randall’s Island est devenue aussi “foot”, c’est aussi parce que New York manque cruellement d’infrastructures pour faire face à la progression du sport. Dans une ville qui s’est bâtie autour du foot US, du baseball et du basket, les pelouses de foot manquent. Même le New York City FC, club professionnel de MLS, évolue dans le stade de baseball des Yankees, dans le Bronx, toujours à la recherche d’une parcelle à racheter pour construire son propre stade. La Big Apple a pourtant investi massivement dans de nouveaux terrains comme celui de Pier5 dans le Brooklyn Bridge Park en 2012. Il suffit également de se balader à travers la ville pour remarquer que de nombreux terrains de sport ont été reconvertis en terrain de foot comme à James Walker Park à West Village, ou au Murry Bergtraum Softball Field dans le Lower East Side. Des complexes de foot indoor comme Socceroof et SoFive ont aussi vu le jour ces dernières années à Brooklyn, mais la place manque encore. C’est face à ce déficit que la Randall’s Island Park Alliance, l’association qui gère le développement des activités et des parcs sur l’île, s’est lancée dans un projet faramineux en 2007 : construire une 60aine de terrains dont un tiers dédiés au football. L’entretien des lieux est d’ailleurs aujourd’hui financé en partie par deux clubs de football locaux, le Manhattan Soccer Club et le Downtown United Soccer Club.