Partout où elle va, l’exposition Hide/Seek fait un passage fracassant. A la National Portrait Gallery de Washington DC, elle avait provoqué l’ire de la Catholic League, une association qui se présente comme le défenseur des intérêts des catholiques américains. Au Brooklyn Museum, le sang du clergé local n’a fait qu’un tour. Au centre du pataquès: un extrait d’une poignée de secondes d’une vidéo montrant le Christ sur la croix recouvert de fourmis. La vidéo avait dû être retirée de la National Portrait Gallery, mais le Brooklyn Museum, qui s’attire régulièrement les foudres de la Catholic League pour sa programmation jugée provocatrice, a décidé de la maintenir dans l’exposition, visible depuis le 18 novembre dernier dans ses murs.
La vidéo censée évoquer les ravages du SIDA n’est qu’une œuvre parmi tant d’autres – moins controversées – présentées dans le cadre de l’exposition, montée par un spécialiste de l’art “queer” Jonathan Katz. Mr Katz, directeur du programme doctoral de Visual Studies à l’université de Buffalo, est un des fers de lance de l’étude de ce type d’art, qui existe depuis la fin du 19ème siècle mais n’avait jusqu’à présent jamais fait l’objet d’une exposition dans un grand musée aux Etats-Unis.
Le commissaire n’a pas voulu tomber dans les clichés. Ainsi a-t-il pris le soin de sélectionner des travaux d’artistes hétérosexuels pour montrer que la représentation de l’homosexualité n’est pas l’apanage de la communauté gay. Si certaines œuvres ont une dimension sexuelle explicite, d’autres sont plus subtiles, invitant le visiteur à en scruter les détails pour cerner la pensée de l’auteur. C’est le cas du tableau de George Wesley Bellows, un peinte hétérosexuel de la fin du 19ème siècle, qui a produit le tableau d’un groupe d’hommes se déshabillant sur la plage sous un soleil qu’on imagine de plomb. Au milieu de la foule, on aperçoit un homme habillé de la tête aux pieds. Un intrus qui évoque la « fluidité sexuelle » des jours d’été, le voyeurisme.
Les artistes exposés sont connus et moins connus. Dans la catégorie des stars, citons le photographe Robert Mapplethorpe, dont les clichés sado-maso avaient déclenché une beau scandale lors de leur exposition à la Corcoran Gallery à Washington en 1989. Un portrait signé Grant Wood (si, si, le papa de la peinture du couple de fermiers austères avec sa fourche) figure aussi dans l’exposition. Chez les moins connus, citons Thomas Eakins, un peintre du 19ème siècle dont le tableau « Salutat », montrant un boxeur élancé et musclé saluant d’un geste gracieux une foule masculine en marge d’un combat, accueille le visiteur à son arrivée. Citons aussi Tee Corinne, une photographe qui dans les années 70 a encouragé des femmes à prendre en photo d’autres femmes.
Avertissement du musée : certains travaux peuvent choquer un public non-adulte.
Infos pratiques:
Hide / Seek – du 18 novembre 2011 au 12 février 2012 au Brooklyn Museum – 200 Eastern Parkway Brooklyn – (718) 638-5000. Site ici
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