L’histoire de Stéphane Lautner ressemble à celle de beaucoup d’autres parents devenus des militants de l’éducation bilingue. Père de deux filles de 5 et 7 ans, ce Franco-Américain qui parle français “en permanence” à ses enfants n’a pas souhaité les scolariser dans un établissement franco-américain privé, trop onéreux.
Il s’est tourné vers le système public mais, dans son quartier de l’Upper East Side, aucune école n’offre de programme français-anglais. “Ce n’est pas en parlant le français uniquement à la maison que les enfants vont apprendre à lire et écrire correctement. C’est via le portail de l’éducation que cela se fait“, explique ce New-Yorkais de naissance, fils d’une mère française et d’un père d’origine allemande.
Employé d’une banque française, il a donc décidé de se retrousser les manches. Après avoir participé au lancement cette année d’un afterschool de l’association EFNY (Education française New York) dans l’école de son aînée, PS 527, il voit plus grand. Vendredi 13 décembre, il organise une réunion publique dans l’Upper East Side, en présence notamment d’un élu local et d’une représentante du Département de l’Education, pour démontrer l’intérêt des parents d’élèves pour le lancement, à la rentrée 2020-2021, d’un programme bilingue public (Kindergarten-5th Grade) au sein du District 2. L’initiative est soutenue par les Services culturels de l’Ambassade de France aux Etats-Unis et le consulat de France à New York.
Le District 2 recouvre presque tout Manhattan sous la 96eme rue (à l’exception de l’Upper West Side et du Lower East Side). “Je veux que tous les parents francophones du District 2 participent à cette réunion, qu’ils aient des enfants dans la fourchette d’âge recherchée ou pas, et les parents anglophones qui veulent un tel programme“, déclare-t-il.
Plusieurs initiatives menées par des parents français ont vu le jour dans le passé au sein de ce vaste district scolaire (à Battery Park City, TriBeCa et Midtown), mais aucune n’a abouti. “Le District 2 est assez bien loti en terme d’inscriptions dans les écoles locales et de résultats scolaires. Les dirigeants d’établissements ne voient donc pas l’intérêt de créer un programme bilingue, qu’ils considèrent comme une source de problèmes pour le recrutement et la certification des enseignants“, analyse Stéphane Lautner. La majorité des programmes bilingues lancés ces dernières années l’ont en effet été dans des écoles en difficulté, à la recherche d’outils pour attirer des élèves supplémentaires.
Autre défi, selon lui: même si le District est très étendu, les écoles locales recrutent au sein de zones restreintes, ce qui ne permet pas de mobiliser un grand nombre de familles.
Stéphane Lautner ne se démonte pas pour autant. Selon lui, “l’intérêt existe” chez les parents. Il en veut pour preuve le doublement des classes de l’afterschool de français d’EFNY à PS 527 en quelques mois (de deux à quatre). Il dit aussi avoir l’oreille des autorités du District. “Il est possible que ce projet n’aboutisse pas à temps pour l’entrée de ma plus jeune fille en Kindergarten. Mais je ne veux rien lâcher. Je le fais pour les générations futures“.