Est-ce que le regard bleu perçant de Clint Eastwood et la carrure de John Wayne seraient devenus légendaires sans leurs célèbres chapeaux Stetson ? Ces couvre-chefs en feutre aux bords larges sont reconnus aujourd’hui comme les chapeaux les plus emblématiques des États-Unis. La légende de cet accessoire vestimentaire popularisé au début du XIXe siècle a largement dépassé les fermiers de l’Ouest américain et les acteurs des films westerns hollywoodiens. S’ils sont souvent réduits au cliché du cow-boy et assimilés, à tort, à une période nostalgique de l’Ouest américain, les chapeaux de cow-boys ne sont pas du tout pris à la légère par une grande partie du pays, dont une quinzaine d’États les utilisent dans leur quotidien. Pourquoi les chapeaux de cow-boys sont-ils si légendaires aux États-Unis ? C’est la question bête de la semaine.
Le chapeau n’est pas né dans l’Ouest américain. Les historiens sont tombés d’accord pour estimer l’origine du chapeau en Espagne, au temps des invasions des cavaliers mongols au XIIIe siècle. La calotte ne ressemblait pas exactement à celle du chapeau porté aujourd’hui, mais l’idée était déjà là : une calotte haute et des bords larges pour se protéger du soleil.
Pourtant, ce sont les Américains qui ont popularisé le chapeau de cow-boy tel que nous le connaissons aujourd’hui. Le produit iconique est devenu célèbre en 1865, grâce au chapelier John B. Stetson qui, après un voyage au Far West, décide de créer un chapeau aux bords plats et à la calotte haute, afin de protéger les fermiers des intempéries. Le « Boss of the Plain » est né d’une idée simple : aider les fermiers à lutter contre la rudesse de l’Ouest.
Qu’ils soient surnommés Diamond, horse shoe, ou quarter horse, les chapeaux ont tous un point en commun : ils sont portés par toutes les classes sociales américaines, du fermier au banquier. « Ce chapeau est avec vous tout le temps, à vos côtés. C’est le symbole américain par excellence, de travail et d’humilité », explique Keith Mundee, président de l’American Hat Company, basé à Bowie, au Texas. La société fondée à Houston en 1915 fabrique près de 175 000 chapeaux par an, dont le très populaire 40x, composé à 40% de poil de castor.
Depuis le lancement de la série « Yellowstone », Keith Mundee a vu bondir les demandes de plus de 50% par rapport à 2020.« C’est un cycle. En ce moment, c’est très populaire et cool d’être un cow-boy, grâce à cette série. Dans les années 1970, le film ” Urban Cow-boy “ avait aussi attiré le grand public. »
Hollywood remporte donc la palme d’or pour avoir popularisé les chapeaux de cow-boys ? Pas seulement. Selon Keith Mundee, les Américains sont bel et bien attachés aux valeurs portées par ce chapeau. « Les Américains sont très attachés aux grands espaces, à la poésie, ou encore à la musique qui racontent l’histoire de leur pays. Et le cow-boy, avec tout ce qu’il symbolise, en fait partie. Selon moi, ce ne sont ni les bottes, ni les vêtements, ni la ceinture qui font de moi un cow-boy, c’est le chapeau », assure ce Texan qui admet posséder une vingtaine de chapeaux en feutre, un pour chaque événement important de sa vie. « On achète un chapeau pour ses petits-enfants, pour un mariage, pour le garder près de soi. C’est aussi un symbole de travail, d’humilité et d’aventures, et porter un chapeau vient avec des responsabilités : garder sa porte ouverte, être poli et rester humble… Des valeurs chères aux Américains ».
C’est aussi un moyen de rapprocher les Américains de cette culture parfois lointaine pour certaines parties des États-Unis. « Quand je vais à New York, je fais toujours des rencontres intéressantes et les gens viennent me parler, car ils sont sensibles et curieux de ce que représentent le chapeau et les valeurs qui l’accompagnent. Pas besoin de vivre dans le Far West pour l’aimer ! » s‘enthousiasme Keith Mundee.