Pas besoin de vivre aux États-Unis ou au Canada pour l’avoir dans son armoire : la chemise à carreaux rouge et noir se porte dans tous les pays du monde, en hiver comme en été. Mais aux États-Unis, le « Buffalo plaid », pratique, chaud et confortable, est incontournable. Pourquoi est-il si ancré dans la culture américaine et quelles sont ses origines ? C’est la question bête de la semaine.
Aux États-Unis, on les surnomme « flannels shirts » , « red plaid shirts » , ou encore « Lumberjack shirts » (« chemises de bûcheron »). Les passionnés d’histoire et de textile aiment rappeler que le terme historique est « Buffalo plaid ». Randonneurs, hipsters ou cow-boys partagent pourtant le même modèle à carreaux, à quelques détails près. La chemise iconique américaine n’est pas née aux États-Unis, mais en Écosse et en Angleterre. Au XVIIIe siècle, les Écossais filent la laine pour produire de la flanelle et des tissus imprimés. Ce sont les tartans, ancêtres de la chemise à carreaux. Chaque clan écossais possédait alors son propre motif. Les tartans étaient même devenus un symbole d’opposition à la couronne d’Angleterre, car ils étaient interdits.
Une centaine d’années plus tard, un cardeur de laine nommé John Rich s’installe en Pennsylvanie et ouvre une usine à laine, la Woolrich Woolen Mills. Le jeune Anglais se fait vite connaître par les bûcherons locaux et par les trappeurs pour ses couvertures et chaussettes en flanelle. C’est en 1850 que John Rich créé la célèbre chemise en laine à carreaux rouge et noir. La légende raconte qu’un Écossais, John Mc Cluskey, se serait implanté dans le Montana. Lors d’une rencontre avec les populations amérindiennes, il aurait échangé des fameux tartans contre des peaux de bison. Les deux hommes se seraient ensuite entendus pour surnommer les chemises à carreaux « Buffalo plaid ». Une autre légende raconte que John Rich élevait des bisons d’Amérique en parallèle de ses activités commerciales.
Ce qui est certain, c’est que les chemises à carreaux rouge et noir connaissent un succès important auprès des cow-boys, des pionniers, des agriculteurs et bien sûr, des bûcherons. « Il fallait des vêtements pour se protéger du froid. C’est un textile qui est toujours chaud et très pratique, c’est plus qu’un héritage », explique Gayle Houlton, fondatrice de la société Rocky Mountain Flannel Company. Basée au Canada, l’entreprise de vêtements possède de nombreuses adresses aux États-Unis et dans plusieurs pays du monde. « Lorsque nous avons commencé, c’était surtout un modèle pratique. Depuis 2012, c’est devenu fashion. Aujourd’hui, tout le monte possède une chemise en flanelle. Australie, Afrique du Sud… Le monde entier vient dans ma boutique », assure la passionnée de textile qui a fondé cette marque en 1989 au pied des Rocheuses canadiennes.
La chemise à carreaux a traversé les âges. En 1914, le personnage de bande dessinée Paul Bunyan devient un des symboles du folklore américain. Le bûcheron géant arbore une hache et une chemise à carreaux… rouge et noir. Puis, le groupe de musique The Beach Boys fait d’elle une véritable star, en portant un modèle pour la couverture du single « Surfin’ U.S.A. » dans les années 1970.
Enfin dans les années 1990, le leader du groupe de rock Nirvana, Kurt Cobain, fait de la chemise à carreaux un emblème du style grunge. 200 ans après sa création, la chemise Lumberjack continue de traverser les saisons et les styles, des comédies romantiques américaines, jusqu’aux marches des podiums de prêt-à-porter les plus célèbres.