Cela n’a pas pu vous échapper. Pour les Américains, lorsqu’il s’agit d’attraper un stylo, le script est l’écriture par défaut.
Pourquoi ? Tout d’abord parce que les écoles américaines se focalisent sur l’apprentissage du script. “L’écriture cursive est de moins en moins enseignée aux Etats-Unis, et ne figure pas dans les priorités des enseignants”, regrette Barbara Getty, auteure de manuels d’écriture et coach en la matière. De plus, en dehors de l’école, “c’est un type d’écriture auquel nous sommes de moins en moins confrontés. Beaucoup d’adultes ne savent pas écrire en attaché”, constate-t-elle.
Aux Etats-Unis, le déclin de l’écriture en attaché a commencé dans les années 30, nous append Kate Gladstone, fondatrice de Handwriting Repair/Handwriting That Works. L’enseignement se démocratisait, et l’écriture cursive était considérée comme compliquée (elle intégrait beaucoup plus d’effets de style, de boucles). Les enseignants ont mis la priorité sur l’apprentissage du script, plus simple et neutre.
L’apprentissage de l’écriture cursive a alors été repoussé de quelques années. Puis, il s’est progressivement réduit, en particulier depuis trente ans, les écrans enracinant les jeunes dans l’usage quotidien du script. “Les enseignants d’aujourd’hui ne savent pas comment enseigner l’écriture cursive”, note Kate Gladstone.
D’ailleurs, dans les fameux “Common Core Standards” (tronc commun de connaissances), l’apprentissage de l’écriture en attaché n’est plus obligatoire (certains Etats, comme la Caroline du Nord, ont toutefois voté des lois pour rétablir cet enseignement).
Reste qu’il s’agit d’une vraie différence avec la situation qui prévaut en France, où l’écriture cursive est enseignée en priorité, dès le CP, juste après l’apprentissage des lettres capitales. Les élèves français apprennent à lire le script, mais ils ne l’écrivent pas – ou très peu – à l’école, nous rappelle une enseignante en école primaire.
Qui a raison, qui a tort ? Difficile d’avoir une position tranchée, et le sujet soulève des débats passionnés. Marion Wilm, psychologue, argue que l’écriture cursive permet, plus que le script, de développer des capacités motrices fines, des compétences spatiales et visuelles différentes. Les défenseurs des cursives déplorent aussi que les enfants américains n’arrivent plus à lire une lettre de leurs grand-parents ou un texte historique original, et ne peuvent plus écrire une jolie carte de voeux en attaché.
D’autres, comme Kate Gladstone, rappellent que l’important est de pouvoir lire l’écriture en attaché, mais que maitriser l’art des boucles n’est pas fondamental dans le monde d’aujourd’hui.
Surtout, ce débat cache un autre question, plus préoccupante: le déclin, aux Etats-Unis, de l’écriture manuelle tout court, affirme Barbara Getty. “Nous voyons beaucoup de gens qui ont du mal à écrire à la main, car ils n’ont presque plus d’occasions de le faire. D’ailleurs, pendant leur scolarité, les élèves rendent de moins en moins de travaux écrits à la main. Dans le SAT, il y a une épreuve d’écriture, et elle cause beaucoup d’angoisse aux adolescents.” Qui n’a pas rendu ses lignes ?