Quiconque a déjà goûté un cidre français et un cidre américain (appelé hard cider) aura remarqué une différence marquée entre les deux. Qu’est-ce qui donne au cidre français ce goût distinctif par rapport à son cousin américain ? C’est question bête du jour.
« C’est une différence génétique des pommes car, en France, elles sont douces-amères et cette variété n’existe pas aux États-Unis », explique Patrick Collins, fondateur de Patois, une cidrerie qui a pris le parti de fabriquer la boisson à partir d’une variété de pommes anciennes. En France, particulièrement en Normandie et en Bretagne, « on cultive des variétés de pommes spécifiquement pour le cidre, comme les pommes douces, amères, et acidulées », note le producteur de Charlottesville (Virginie). Ces variétés sont souvent trop âpres pour être consommées telles quelles, mais elles donnent au cidre un profil de saveur complexe et équilibré.
« Aux États-Unis, les cidres sont souvent élaborés à partir de pommes de table, principalement douces et moins tanniques », souligne Patrick Collins. Le résultat est un cidre généralement plus sec et moins sucré. Cependant, un mouvement vers « l’utilisation de variétés de pommes à cidre traditionnelles commence à prendre de l’ampleur aux États-Unis », offrant des saveurs plus proches de celles des cidres français.
La tradition et les différences culturelles pourraient également expliquer le goût sec du cidre américain. Le cidre français est souvent produit à selon la méthode traditionnelle de fermentation qui permet de préserver les saveurs naturelles des pommes tout en développant des arômes. Cette fermentation est généralement plus longue, parfois étalée sur plusieurs mois.
En revanche, aux États-Unis, le cidre est souvent fabriqué avec des méthodes de fermentation rapide pour répondre à la demande. Cela peut donner des saveurs plus légères et moins nuancées. Les cidres américains sont aussi souvent filtrés et pasteurisés, réduisant ainsi les arômes naturels et les tanins qui caractérisent les cidres français. Pour contrer cette tendance, « de nombreuses cidreries ont lancé un projet qui utilise seulement les pommes sauvages », souligne Patrick Collins, qui en fait partie avec son entreprise Patois.
En France, le cidre est une boisson artisanale avec des règles de production précises et une longue histoire. Les appellations d’origine contrôlée (AOC), comme celles du Cidre de Normandie ou du Cidre de Bretagne, garantissent des standards de qualité et des méthodes de production précises. Aux États-Unis, bien que certaines régions commencent à cultiver des pommes spécifiques pour le cidre, il existe moins de régulations, ce qui donne plus de liberté aux producteurs pour expérimenter.
« C’est aussi une question de climat », rappelle le producteur américain. Le terroir joue un rôle essentiel dans le goût du cidre. « En Virginie, nous avons un climat plus chaud qu’en Bretagne, donc cela produit des cidres avec plus de sucre, donc plus d’alcool par exemple », souligne-t-il. En France, les sols riches en argile et en schiste de Normandie et de Bretagne apportent aux pommes des saveurs uniques et intenses. Le conseil de notre expert pour trouver du bon cidre ? « Il faut rester local, aller voir les producteurs qui travaillent avec des pommes ‘heirloom’ ».