On ne va pas vous mentir. Comme vous, en arrivant à New York, on a passé notre temps à suivre les écureuils dans Central Park et à les prendre en photo sous toutes les coutures. Et puis, on a fini par se poser la question : pourquoi en y-a-t-il autant en pleine ville ? C’est notre question bête de la semaine.
Ce qui peut sembler normal aux New-Yorkais est une curiosité pour les autres. Comme l’a écrit le New York Magazine, « la plupart d’entre nous les ignore, et ceux qui ne le font pas sont bizarres ». Selon le dernier chiffre de la Central Park Conservancy, estimation datant de 2022., il y aurait à 2 373 écureuils à Central Park.
Etienne Benson, professeur assistant au sein du Département d’Histoire et de Sociologie de UPenn, s’est penché sur la question dans son article « The Urbanization of the Eastern Gray Squirrel in the United States ». Il confirme que les écureuils ne sont pas arrivés en ville par hasard : ils ont été introduits par les humains pour… leur propre plaisir ! En fait, les écureuils gris qui peuplent Central Park ne sont pas du tout originaires de la ville. Ils avaient été pratiquement éradiqués à cause de la déforestation et de l’urbanisation, avant d’être réintroduits à la fin du XIXe siècle pour divertir les promeneurs.
La ville n’oublie pas de leur fournir à manger et de petits abris, notamment pour survivre à la rigueur de l’hiver. Au milieu des années 1880, on estimait à 1.500 le nombre d’écureuils à Central Park. Le chercheur ajoute : « La présence d’écureuils est liée à une idéologie selon laquelle la nature en ville est essentielle au maintien de la santé physique et mentale des habitants ».
Les écureuils avaient également un rôle pédagogique : ils servaient « d’éducateurs mentaux » pour les enfants. Etienne Benson précise: « nourrir les écureuils est rapidement devenu un moyen d’encourager les comportements compatissants (…) et de guérir les enfants de leur tendance à la cruauté ».
Mais dès les premières décennies du XXe siècle, la population grandissante d’écureuils commence à agacer les riverains, sans compter que les petits mammifères deviennent agressifs, s’installent dans le grenier des maisons et effraient les oiseaux lorsque les promeneurs tentent de les nourrir. Dans les années 1960 et 1970, qui correspondent à la montée en puissance des mouvements environnementaux, la présence des écureuils est avant tout considérée d’un point de vue écologique : on admet qu’il faut les laisser vivre leur vie comme la nature l’entend… et donc cesser de les nourrir. « Il y a eu un tournant à la fin du XXe siècle. Nourrir les animaux est presque devenu un crime ou un pêché, tout le contraire d’avant ». À défaut de les nourrir, on peut au moins les regarder. Un spectacle toujours réjouissant, même quand on vit à New York depuis longtemps !
Première version publiée le 30 juin 2014. Mise à jour le 28 août 2024.
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J’en ai un apprivoisé dans mon jardin de Long Island qui vient manger dans ma main tous les matins ….
Je suis sur que vous pouvez en trouver dans la cuisine “ethnique” a NYC…