« Nous sommes très ambitieux aux États-Unis, je dirais même que le marché américain demande plus de Veolia ». C’est avec ces mots enthousiastes que la directrice générale de Veolia, Estelle Brachlianoff, a inauguré le voyage de presse à New York, jeudi 18 avril, au cœur de Manhattan. Intitulé « Deep dive », il était l’occasion pour le groupe français de faire le point sur son programme stratégique GreenUp 2024-2027, et ses ambitions sur ses activités américaines en plein essor. Mais aussi sur les opportunités uniques du marché, alors que l’EPA, l’agence américaine de régulation environnementale, vient d’annoncer un plan de régulation sur la présence de PFAS, des composants chimiques très durables et qualifiés de « polluants éternels », dans l’eau courante.
Les États-Unis représentent le deuxième marché de Veolia derrière la France, soit 5,4 milliards de dollars de chiffre d’affaires l’an passé et 11% du total du groupe. Près des deux tiers de ces revenus (64%) sont tirés des technologies et nouvelles solutions sur l’eau (32%), l’exploitation de services d’eau et d’assainissement (21%), l‘eau régulée (13%). Outre l’eau, Veolia fournit ses services de traitement des déchets dangereux (25%) et d’énergie (9%). Au total, le groupe du CAC40 constitue le plus important opérateur privé des services d’eau du pays, qui opère plus d’une centaine de sites industriels, quatre centres de R&D et emploie 12 000 salariés.
Veolia a aussi su tirer parti du dynamisme d’un marché américain en forte croissance. L’entreprise d’Aubervilliers a multiplié ses revenus par 2,6 en l’espace de quatre sans seulement, et le pays de l’Oncle Sam représente actuellement un terrain unique d’opportunités. « Nous assistons à un momentum que nous n’avons pas vu dans les dix dernières années. Il existe un vrai enjeu pour mettre au point les technologies, construire les sites et la logistique pour proposer nos services dans le pays sur le long terme », s’enthousiasme Karine Rougé, CEO municipal Water de Veolia North America.
Les chiffres sont alléchants : le marché américain de la dépollution représente 360 milliards de dollars, 160 milliards pour la régénération des ressources et 135 milliards de dollars pour la décarbonation, soit 25% du marché mondial sur lequel opère Veolia. Lorsque l’on sait que les États-Unis ne pèsent encore que 11% de l’ensemble du groupe, la marge de progression est immense.
Surtout, les nouvelles normes réglementaires que l’EPA a sorti sur les « polluants éternels » le 10 avril dernier, sont sur le point de rebattre totalement les cartes du secteur. Elle a identifié six composants chimiques accusés d’être responsables de cancers, de troubles de la fertilité et du développement chez les enfants, et va obliger les agences municipales à rester sous le seuil minimal détectable par les tests aujourd’hui. Une décision majeure et une mesure qui pourrait coûter plus de 3 milliards de dollars par an aux collectivités locales, ont fait valoir les associations du secteur.
Pour Veolia, l’opportunité est historique : « Aujourd’hui, nous sommes capables de pouvoir définir les besoins, construire des solutions et minimiser les coûts et risques », a expliqué Karine Rougé. Certes, la concurrence locale ne manque pas sur le marché américain du traitement des PFAS, comme Cyclopure, Pentair ou Aquasana. Mais la relation historique que Veolia entretient avec les collectivités locales, ses clients directs dans le traitement de l’eau, place le groupe français dans une position optimale pour embarquer les technologies les plus prometteuses dans les usines qu’il opère. Comme celle du traitement de l’eau d’Haworth dans le New Jersey, déjà équipée de dix systèmes de traitement des PFAS réglementés, et qui est en train d’en concevoir et construire 16 nouveaux.
Veolia a chiffré son ambition aux États-Unis : le groupe français compte doubler de taille d’ici à 2030, et croître de 50% d’ici à 2027. En termes d’impact concret sur l’environnement, cela signifie effacer 600.000 tonnes d’émissions de CO2, préserver 120 millions de mètres cubes d’eau (soit la consommation annuelle de la population de San Francisco) ou encore traiter deux millions de tonnes de déchets dangereux. Un eldorado du XXIe siècle.