“Cette élection m’aurait intéressé si la gauche avait réussi à s’unir. N’étant pas unie, ça n’est plus mon problème. […] Ce sont deux médiocres. Je ne fais pas campagne pour les médiocres”. Artiste polymorphe, et citoyen plus qu’engagé, Philippe Torreton ne mâche pas ses mots quand il parle de la prochaine élection présidentielle et de Benoît Hamon et Jean-Luc Mélenchon.
En pleine tournée avec “La résistible ascension d’Arturo Ui” de Bertold Brecht en France et le spectacle “MEC !” aux Etats-Unis, l’acteur vient de publier une lettre ouverte aux deux candidats de gauche. Il y fustige le refus de toute alliance entre les deux hommes. “Ce qui m’intéressait, ce n’était ni l’un ni l’autre, mais les deux ensembles, c’était la seule chance de gagner, explique le comédien. S’ils pensent qu’il y a des urgences écologiques, ils auraient dû s’entendre. Sinon ça veut dire que ce n’est pas si grave. Visiblement, l’écologie pour Benoît Hamon et pour Jean-Luc Mélenchon peut attendre encore cinq ans. C’est ça qui me rend fou de rage.”
Du 2 au 6 avril, l’acteur sera aux Etats-Unis, un pays devenu “fragile” selon lui, notamment en raison de “l’amateurisme politique” de son président. L’acteur se produira en duo avec le percussionniste de jazz Edward Perraud le dimanche 2 avril à Richmond, le mardi 4 avril à Washington et le jeudi 6 avril à New York avec son spectacle “MEC !”. Sur scène, les deux artistes déclament, à leur manière, les textes écrits par le poète et chanteur Allain Leprest.
Peu connu du grand public, Allain Leprest a écrit pour de nombreux artistes et était très apprécié par de grands chanteurs comme Jean Ferrat, Juliette Gréco ou Henri Salvador. “Claude Nougaro disait de lui qu’il était le Rimbaud du XXème siècle. Beaucoup de gens l’ont admiré, dont moi. Je l’ai découvert à 17 ans et j’ai été saisi par la force de ses textes. J’avais le sentiment d’avoir la chance d’assister au concert d’un autre Brel”, se souvient Philippe Torreton.
“Ce n’est pas forcément un hommage qu’on rend à Leprest. En tout cas, je ne l’ai pas pris comme ça. Je suis vraiment dans la position d’un comédien à qui on a permis de dire des textes extraordinairement forts et beaux. C’est comme quand on joue Shakespeare, on ne dit pas qu’on lui rend hommage”, explique l’acteur.
Il y a quatre ans, le producteur Jean René Pouilly souhaite monter un spectacle pour faire connaître les textes du poète, disparu prématurément en 2011. Il pense rapidement à Philippe Torreton, sans savoir que ce dernier est un admirateur de Leprest. L’acteur fait ensuite la rencontre d’Edward Perraud, lui aussi grand amoureux des textes du chanteur. Tous deux sillonnent depuis quatre ans les routes de France et bientôt des Etats-Unis. “Heureusement qu’Allain s’écrit avec deux “L”, ça va nous permettre de voler au-dessus de l’Atlantique”, s’amuse l’acteur.
Habitué des scènes de théâtre, Philippe Torreton déclame pour la première fois des textes sous forme de récital avec “MEC !”. “N’étant pas musicien dans l’âme, ça me faisait assez peur au départ. En fait, quand on interprète on ne se pose plus ces questions-là. Avec Edward, on a tout de suite fonctionné à l’instinct et on n’a jamais eu de problèmes de rythmes. On est un vrai duo. On dit les textes chacun à notre façon. Lui c’est avec ses sons et ses rythmes”, explique le comédien.
Après plus d’une centaine de représentations, le duo viendra donc pour la première fois aux Etats-Unis pour présenter ce spectacle. “Les gens qui viennent nous voir sont très émus, explique Philippe Torreton. Ceux qui le connaissaient redécouvrent ces textes et ceux qui ne le connaissaient pas sont sidérés d’être passés à côté d’un tel poète. C’est très émouvant.”