Quand le guide Michelin a donné trois étoiles au The Inn at Little Washington de Patrick O’Connell en septembre, cela a confirmé ce que tout le monde savait déjà à Washington DC: le chef américain est l’un des meilleurs des Etats-Unis. Déjà en 1987, Relais & Châteaux lui avait même décerné le titre de “Grand Chef”.
“Les critiques gastronomiques français aiment la sincérité que je mets dans ma cuisine”, confie Patrick O’Connell, qui a même dirigé la branche américaine de Relais & Châteaux de 2010 à 2017. “The Inn at Little Washington, c’est un peu comme s’émerveiller dans la campagne française. Alors que d’autres jeunes chefs américains se préoccupent de ce qu’il y a dans l’assiette, j’aime penser que je donne une expérience totale à nos clients”.
La relation passionnelle entre la France et Patrick O’Connell remonte aux années 60, quand le jeune étudiant décide d’aller à Paris pour suivre un cours de littérature anglaise. “Un jour, j’ai déjeuné avec mon professeur qui m’a convaincu d’explorer l’Europe, j’ai arrêté mes études et j’ai pris mes économies que j’avais accumulées en travaillant dans la restauration pour voyager”.
A Paris, il découvre les saveurs de la cuisine française. “C’était magnifique, je n’avais jamais goûté des plats aussi remarquables”, se souvient-il. Il remarque aussi que les chefs, en France, sont respectés pour leur “métier”, “alors qu’aux Etats-Unis, ce n’était pas vraiment considéré comme un choix de carrière”.
Pour lui, la France représente “la beauté et la sexualité” à son niveau le plus élevé. Il y découvre un sens du détail comme il n’a jamais vu auparavant. Quand il ouvre The Inn at Little Washington en 1978, il applique ce savoir-faire français avec talent. Le guide Michelin a loué cet aspect dans la description du restaurant : “Dès le début, leur attention extraordinaire au détail et aux produits transparaît dans l’amuse-bouche à la gelée de tomates traditionnelles BLT, ou dans l’excellent pain de seigle enduit de beurre alvéolé”.
Ne demandez pas au chef son plat français préféré, car il les aime tous. “J’aime la qualité extraordinaire des plats ordinaires, comme un bon pain ou un bon croissant, une excellente omelette ou un poulet rôti”, explique-t-il. Depuis dix ans, il entraîne ses chefs à devenir experts d’un met “simple” pour arriver à produire le meilleur.
“Je voulais les meilleurs croissants, j’ai donc ramené des croissants de Paris à mon chef pour qu’il les goûte et s’exerce à faire un croissant comme on peut le manger en France. Aujourd’hui, je peux dire que le seul croissant qui surpasse le nôtre est celui du Ritz à Paris”, affirme le chef de 72 ans, fier de son équipe.
Le 27 février prochain, Patrick O’Connell sera à la maison de l’ambassadeur à Washington DC pour participer au “Dîner du siècle” du Comité tricolore: 16 grands chefs américains et français réunis pour cuisiner un menu extraordinaire, rendant hommage à Joël Robuchon et Paul Bocuse.
Deux chefs que Patrick O’Connell a rencontrés et qu’il admire. “J’ai rencontré Paul Bocuse en 1978, juste avant l’ouverture de mon restaurant. J’ai apprécié l’expérience de son restaurant à Lyon, et ce merveilleux sens du théâtre, de l’expérience”, raconte-t-il. Plus jeune, il se sent inspiré par Joël Robuchon, qui “se concentre sur l’essence et la pureté des ingrédients”. Lors de son dernier passage à Paris, il s’est d’ailleurs rendu à L’Atelier, le restaurant du chef décédé en août: “le restaurant était plein comme jamais, il n’y avait pas de tristesse. Les chefs continuent de porter son héritage”.