Le destin s’amuse parfois à jouer des tours inattendus. Pascale Bassan, 59 ans, peut en témoigner. Cette Nancéienne a en effet emprunté des chemins inattendus avant de trouver son havre de paix à Santa Barbara. L’appel du voyage s’est ainsi fait sentir dès son plus son âge, en dépit d’un environnement plutôt terne : «Ma famille était installée dans le plus grand immeuble HLM d’Europe, au Haut du Lièvre, se souvient-elle. J’avais le sentiment d’y étouffer, de manquer de verdure. J’ai très vite rêvé de m’en échapper. Au début des années 60, lorsque des familles réfugiées venant de l’ancienne Indochine y ont été placées, j’ai eu le déclic. Je trouvais ces gens tellement beaux, différents, que je me suis prise de passion pour les cultures asiatiques. Cela ne m’a pas lâché depuis…».
Devenue adulte, diplômée de l’Ecole Normale, Pascale Bassan met provisoirement de côté ses rêves d’ailleurs. Mais ceux-ci se rappellent très vite à elle : «J’étais professeur d’histoire-géo et j’avais emmené mes élèves assister à la projection d’un documentaire de Connaissance du Monde sur Bali, en présence du réalisateur. Après le film, je suis allée lui poser des questions. Nous sommes devenus amis. J’ai alors appris qu’avec deux mois de salaire, je pouvais payer mon billet pour aller là-bas et pour y vivre pendant dix semaines. Je n’ai pas hésité : je suis partie dès la fin de l’année scolaire.»
Pascale Bassan revient sous le charme et repart dès l’été suivant. Elle y fait alors la connaissance d’un Américain dont elle tombe amoureuse. Les deux amants se rendent visite durant un an, avant que la Nancéienne ne fasse le choix d’aller s’installer en Californie : «J’ai alors travaillé un an au Lycée français de Los Angeles, avant de me mettre en disponibilité de l’Education nationale en 1979. J’ai ensuite commencé à voyager en Asie, puis à importer des objets d’art, des antiquités et des bijoux du Népal ou d’Inde.»
Ce business dure quelques années, mais le krach boursier de 1987 vient y mettre un terme brutal : «Pour continuer, il fallait beaucoup d’argent et de patience, car les clients sont fluctuants. C’était un luxe que je n’avais pas. Nous nous étions installés à Santa Barbara, qui est un petit marché économique, et cette année-là a aussi été celle de mon divorce. Seule avec deux enfants, je ne pouvais plus continuer.»
Pascale Bassan prend donc le temps de faire le point et décide en 1990 de passer sa licence d’agent immobilier. «Je pensais que c’était un métier facile que l’on pouvait faire à mi-temps. Quelle erreur ! C’est un travail permanent et très dur, mais j’ai vraiment appris à l’apprécier.»
Le succès est d’ailleurs au rendez-vous, avec quelques transactions non négligeables : «J’ai vendu la maison d’Alan Parson, fondateur du groupe “The Alan Parson Project” dans les années 70 et 80. J’ai aussi vendu une maison à Patrick Aumont, fils de Jean-Pierre Aumont, en 1994. La transaction a duré neuf mois (toute la grossesse de sa femme qui a accouché 2 jours avant la signature) à cause d’un divorce très belliqueux des vendeurs qui ne payaient plus leur emprunt. La banque allait reprendre la propriété quand les vendeurs ont déclaré faillite pour empêcher la banque de reprendre la maison. Cela m’a valu de gagner le Howard Gates Award pour avoir mené à bien la transaction la plus difficile de l’année ! Quant à la maison la plus chère que j’ai vendue, le prix était de 5,5 millions de dollars.»
Après plus de 20 ans dans la profession, Pascale Bassan n’a toutefois pas oublié l’Asie – comme en témoigne l’intérieur de sa maison, parsemé de nattes en paille de riz, de buddhas et d’estampes japonaises – et ses envies de voyage. Malgré son amour pour Santa Barbara «sa nature, ses montagnes, l’océan, la gentillesse des gens», dont elle est chef d’îlot pour le Consulat de France, l’intéressée tourne son regard vers d’autres horizons : «Je me donne encore trois ans dans ce métier. Par la suite, j’aimerais m’engager dans l’humanitaire et peut-être me remettre à enseigner puisque je suis toujours en disponibilité. Je pourrais proposer mes services dans les contrées qui m’attirent et me sentir utile. Mais entre temps, beaucoup de choses peuvent bousculer mes plans. Après tout, l’amour m’a fait venir en Californie, ce sera peut-être lui qui m’en fera partir !»