« Nous avions besoin du soutien de l’État de New York. Nous ne pouvions pas lutter seuls contre la ville. » C’est la deuxième victoire en trois mois pour les producteurs de foie gras de la vallée de l’Hudson comme Sergio Savaria. Et c’est peut-être la fin d’une guerre de trois ans. La justice de l’État vient de rejeter l’interdiction de vendre aux restaurants du foie gras adoptée par les autorités de NYC en 2019 pour dénoncer les méthodes de gavage des oies.
Cette nouvelle loi avait été suspendue en septembre dernier, peu avant son entrée en vigueur, suite à la plainte déposée par le collectif Catskill Foie Gras Collective qui réunit les deux principaux producteurs de foie gras des États-Unis, La Belle Farms, présidée par Sergio Savaria, et Hudson Valley Foie Gras. Une seule autre ferme dans le pays, située dans le Minnesota, produit du foie gras à des fins commerciales mais sa taille est très modeste comparée à celle des deux exploitations de la vallée de l’Hudson.
Pour rendre sa décision, le juge de l’État de New York s’est appuyé sur une ancienne loi qui protège les agriculteurs new-yorkais des « restrictions déraisonnables » des autorités locales. « Refuser à ces entités agricoles la vente de leurs produits sur le marché de la ville de New York constitue une violation (des lois de l’État) et menace la viabilité de leurs opérations agricoles », avait déclaré le département de l’Agriculture et des Marchés de l’État. Un argument approuvé par le juge et « juste » aux yeux de Sergio Savaria. « Nous sommes en dehors de NYC, précise-t-il, les autorités de la ville n’ont pas à légiférer sur notre façon de diriger notre exploitation agricole. »
Les restaurants de New York qui proposent du foie gras dans leur menu, estimé à environ un millier avant la pandémie de covid, représentent un tiers du chiffre d’affaires des deux entreprises. L’interdiction aurait pu entraîner « la fermeture de l’une d’entre elles, voire des deux », précise le jugement. Les deux fermes, qui emploient 400 personnes, vendent du foie gras à d’autres États comme le Texas, le Nevada (Las Vegas) ou encore le Massachusetts (Boston), voire à l’étranger « mais rien de comparable avec la ville New York », précise Sergio Saravia.
« Nous avions rencontré les conseillers de la ville de New York et leur avions proposé de venir visiter notre ferme, située à seulement deux heures de la ville, pour voir notre système de production. On avait même proposé de payer le transport. Mais personne n’est venu. Avec la pandémie, notre dossier est devenu secondaire », déplore Sergio Savaria. La chance, reconnaît-il, c’est d’avoir pu convaincre des représentants du département de l’Agriculture et des Marchés – donc au niveau de l’État – de venir à la ferme, il y a quelques années, et que ces derniers aient pris en compte les difficultés du secteur depuis la pandémie.
La ville de New York dispose de 30 jours pour faire appel de la décision. Si elle ne fait rien dans ce délai de temps, l’autorisation de vendre du foie gras deviendra « permanente », a prévenu le commissaire à l’Agriculture Richard Ball dans une lettre adressée au maire de New York, Eric Adams. Les producteurs se disent en tout cas soulagés pour ces fêtes de fin d’année, et, espèrent-ils, pour plusieurs années si la ville renonce à poursuivre la bataille judiciaire. Mais, pour Sergio Savaria, « la guerre ne sera jamais définitivement terminée ».