Mauvaise surprise pour les parents derrière la création d’un nouveau programme à Manhattan. Le Département de l’Éducation new-yorkais (DoE) leur a signifié, dans un court e-mail envoyé lundi 11 janvier, que la filière bilingue (K-5th Grade) qu’ils espéraient ouvrir à la rentrée dans une école publique du borough ne sera pas lancée “à cette heure“, provoquant la frustration et la colère des familles concernées.
Celles-ci l’ont fait comprendre à la “superintendent” (représentant du DoE) de Manhattan Marisol Rosales, auteure de l’e-mail en question, et d’autres représentants du Département lors d’une réunion houleuse organisée mardi soir sur Zoom. Une centaine de parents, dont les enfants sont inscrits pour certains dans les classes bilingues de Pre-K ouvertes l’an dernier dans l’Upper East Side, y ont participé. Une mère célibataire, qui comptait sur l’ouverture d’un tel programme pour poursuivre l’enseignement français de son fils en l’absence de son père, a qualifié la décision du DoE de “dévastatrice” et de “très décevante“, reflétant l’état d’esprit d’autres intervenants. Stéphane Lautner, l’un des quatre parents derrière le projet de programme bilingue, n’a pas non plus caché sa colère, visiblement pris de court par l’e-mail de Marisol Rosales. “C’est une abomination“, a-t-il lâché en accusant le DoE de ne pas avoir travaillé “en partenariat et en bonne foi” avec les parents.
Les parents ayant inscrit leurs enfants dans les classes bilingues de Pre-K dans l’Upper East Side comptaient sur l’extension du programme jusqu’au 5th Grade dès la rentrée de septembre pour éviter tout décrochage dans l’apprentissage du français. Plusieurs écoles ont été approchées dans le District 2, qui recouvre une grande partie de Manhattan en-dessous de la 96ème rue, pour accueillir ces classes supplémentaires. Parmi elles, PS 290, dont la directrice était d’accord pour ouvrir un tel programme, d’autant que l’école a perdu de nombreux élèves, partis à cause de la pandémie.
Pour motiver leur décision, Marisol Rosales et les deux autres représentants du DoE ont mis en avant plusieurs arguments lors de la réunion de mardi. Ils ont notamment parlé du surcoût que représenterait un tel programme dans un contexte financier contraint, de la difficulté à trouver un.e enseignant.e qualifié.e et du possible manque de place à PS 290. Ils ont indiqué vouloir attendre un an afin de voir si les enfants partis à cause de la pandémie revenaient pour évaluer la viabilité d’un programme bilingue dans l’école. “Comme PS 290 est une école qui recrute ses élèves dans sa zone (“zoned school”), les élèves qui vivent dans cette zone sont prioritaires. Si nous ouvrons un programme bilingue dans cette école, les élèves dans la zone n’y auront plus accès et devront être envoyés dans des écoles plus éloignées de là où ils vivent“, a expliqué Jess Meller, directrice de la planification des districts scolaires au DoE, qui participait à la réunion.
Marisol Rosales a réfuté l’idée que le DoE s’était engagé à lancer le programme à la rentrée dans la continuité des classes de Pre-K – ce que les parents contestent. Elle a proposé de travailler avec certains parents pour trouver une solution alternative pour la rentrée de septembre 2021 en attendant de faire un point sur les chiffres de fréquentation et d’envisager un programme bilingue pour la rentrée de 2022. Une proposition accueillie avec scepticisme par des parents incrédules. “Vous donnez la priorité à des familles qui sont parties plutôt qu’à des familles qui sont restées” à New York, a fait valoir une participante. Le projet a le soutien de plusieurs élus locaux, comme le conseiller municipal Ben Kallos et la présidente du borough de Manhattan Gale Brewer.