Un air parisien flotte entre Elizabeth Street et Mulberry, au sud de Houston Street à Manhattan. Depuis près de deux ans, des marques françaises ont jeté leur dévolu sur le quartier de NoLiTa (pour North of Little Italy).
Sézane, Cire Trudon, Maison Kitsuné, Vuarnet, Atelier Cologne, Le Labo, Sandro, Maje… La liste des enseignes françaises s’allonge, constatent les commerçants du quartier. La dernière en date : Ba&sh, qui a inauguré sa cinquième boutique américaine au 257 Elizabeth Street en septembre dernier.
A deux pas de SoHo, la Mecque du retail new-yorkais, NoLiTa propose des loyers plus abordables, explique Stéphane Brenot, agent immobilier spécialiste des locaux commerciaux auprès de l’agence Rice & Associates. « Il y a une différence de minimum 30% entre NoLiTa et une petite rue de SoHo », souligne l’expert, qui estime à environ 375 dollars par pied carré par an le loyer affiché à SoHo contre près de 200 dollars pour NoLiTa.
L’ADN de ce quartier est cependant différent de son voisin SoHo, que les grandes enseignes s’arrachent. « On a l’impression que c’est un peu plus calme que dans le reste de New York. Il y a comme un art de vivre à l’européenne. Comme si la fréquence y était un peu plus lente », décrit Beatriz Zeno, COO de Sézane aux Etats-Unis, qui vient de rouvrir cette semaine sa boutique fermée pour travaux de rénovation.
A deux pas, Cire Trudon est installée sur Elizabeth Street depuis décembre 2015. Julie Leong, responsable de la communication pour le fabricant de bougies, identifie une « atmosphère bohémienne chic » dans le quartier, où s’installent « plutôt des marques artisanales ».
Même constat chez Coclico, magasin de chaussures sur Mott Street, qui compte parmi les plus anciens commerces du quartier. Sandra Canselier a ouvert en 2001. « J’aime les petites boutiques presque toutes indépendantes et très pensées », se souvient la pionnière qui « ne voulait pas se retrouver au milieu de Starbucks et de Macy’s comme à Midtown ».
Sandra Canselier reconnaît toutefois que le quartier a changé. « Dans les années 2000, il n’y avait pas autant de magasins. Ça s’est accéléré ces deux dernières années. Il y a une atmosphère plus “business” maintenant », observe la commerçante.
Un peu plus bas sur la même rue, Pascal Legrand, co-gérant avec sa femme de Gas Bijoux, spécialisé dans les bijoux fantaisie haut-de-gamme, a ouvert boutique en 2002 et connaît le quartier comme sa poche. Il craint, comme sa voisine, que le charme du quartier ne s’émousse.
« Derrière les nouvelles marques qui s’installent ici, il y a beaucoup d’entreprises “corporate”. Le Labo par exemple, ça appartient à Estée Lauder. Derrière cette apparence de petite boutique, il y a une grosse machine. Le staff tourne beaucoup et les loyers risquent d’augmenter », déplore-t-il.
Ces nouveaux venus ont cependant l’avantage d’attirer une clientèle plus jeune, constate Céline Rondineau, gérante de Cire Trudon, qui a vu sa fréquentation presque doubler en deux ans. « Sézane par exemple attire beaucoup de clients, il y a toujours de longues files d’attente devant leur boutique, dont pas mal de millenials (18-34 ans, ndr) », se réjouit-elle.
Pascal Legrand s’amuse même à observer les bloggeuses « qui viennent se prendre en photo dans le quartier par un froid glacial et que l’on voit retirer leurs manteaux d’hiver sur le trottoir ». C’est l’une des raisons pour lesquelles Vuarnet a choisi NoLiTa, note Lionel Giraud, PDG de la marque de lunettes de soleil. « C’est le coin le plus mode, le plus “cool” même si je n’aime pas ce mot. NoLiTa, c’est un bon équilibre ».