Jean Imbert a ouvert son restaurant Encore à New York en décembre et il a toujours un peu de mal à y croire. “Quand je dis que j’ai ouvert un restaurant ici, ça me fait bizarre“, reconnait le chef, emmitouflé dans un gros pull au sous-sol pour se protéger de la redoutable clim’ américaine.
Un mois après l’ouverture du chanteur Pharrell Williams à Miami, dont il est le chef, voilà que le cuisinier de 37 ans débarque à New York, dans le quartier du Meatpacking District précisément. Cette nouvelle aventure, il la doit à Eric Cerato, un restaurateur français qui possède aussi Wanderlust à Midtown. Les deux hommes se sont rencontrés en avril quand le vainqueur de l’émission Top Chef en 2012, aussi propriétaire de L’Acajou à Paris depuis qu’il a 22 ans, est venu cuisiner au sein du Chefs Club à Nolita.
“Il m’a dit qu’il avait un emplacement dans le Meatpacking et qu’il voulait que j’en sois le chef. New York me paraissait impossible, mais au fur-et-à-mesure des rencontres et des visites, la chose a avancé, se souvient-il. J’ai fonctionné à l’instinct. Je n’ai pas de plan de carrière. New York, pour un chef français, semble être la chose la plus impossible. Il n’y a pas de ville au monde qui parait plus dure et plus excitante à la fois. C’est un sacré défi“.
Le résultat est là: un grand espace de 175 places où les murs de briques côtoient des tables en bois et des chaises colorées. Le menu comprend des plats très créatifs, dans la pure veine Jean Imbert, et des clins d’oeil à son enfance (comme “la blanquette de ma grand-mère”). Un membre de son équipe a passé six mois à identifier des producteurs locaux pour constituer ce menu. À part les citrons, achetés auprès d’un petit producteur californien, et les avocats, tout provient de la région new-yorkaise. Le chef a reçu de l’aide de son “parrain à New York“, Jean-Georges Vongerichten, dans cette quête des meilleurs produits. “On est allé très loin dans la recherche. J’ai été un peu un ayatollah, avoue-t-il. Ma mère n’a jamais acheté de produits transformés. Enfant, je voulais savoir d’où venaient les aliments“.
Avec ce premier restaurant new-yorkais, le jeune chef marche dans les pas de plusieurs grandes toques françaises. À commencer par Antoine Westermann, ancien patron du Coq Rico à Flatiron. Jean Imbert a fait un stage dans son établissement trois étoiles à Strasbourg, Le Buerehiesel, quand il avait 19 ans. Il a d’ailleurs recruté Adrien Boulouque, ancien responsable de la carte des boissons du Coq Rico, comme manager d’Encore.
“New York est la ville la plus excitante au monde en terme de cuisine, mais si on enlève Eric Ripert, Jean Georges et Daniel Boulud, il n’y a pas beaucoup de grands chefs français ici”, affirme-t-il. Les trois chefs nommés l’ont tous encouragé dans sa démarche. Quelques amis-clients connus, comme la chanteuse Dua Lipa, Robert De Niro ou encore l’artiste JR (dont une oeuvre trône en salle), sont également venus faire un tour depuis l’ouverture. “C’est une ville à part, c’est là qu’il y a le plus de restaurants que j’aime: ABC Kitchen, Masa, Maison Première à Brooklyn, Locanda Verde…“, poursuit-il.
Ce projet new-yorkais en annonce-t-il d’autres ? “Pour l’instant, je me laisse porter par les choses. Je suis comme sur une rivière, dit-il. Je ne suis pas le meilleur mais je veux que ce qu’on a décidé de faire ensemble soit authentique. Si ca ne marche pas, tant pis, c’est la vie, mais je veux le faire avec humilité“.