Le salon de Mino Cinelu recèle de nombreux instruments. Une dizaine de guitares -au bas mot-, un piano, des tambours et différents instruments africains. Ce musicien français, poly-instrumentiste- il est connu comme percussionniste mais est féru de piano, de batterie et de guitare- a travaillé avec les plus grands: Miles Davis, Sting, Lou Reed, Michel Portal et Elton John, pour n’en citer que quelques-uns. Aujourd’hui, il est l’un des percussionnistes français les plus reconnus de sa génération.
Son style de musique? Beaucoup diront le jazz, mais ce n’est pas tout à fait exact. “Je modifie chaque style de musique et je détourne les instruments que j’utilise. J’ai toujours donné des sueurs froides aux puristes“, s’amuse Mino Cinelu. Amoureux de jazz, de musique monde, de soul et de bien d’autres styles, il les intègre dans tous dans ses morceaux. “Les maisons de disque n’aiment pas: elles ne savent jamais dans quelle catégorie ranger mes albums”, raconte l’artiste. Cela ne pose pas de problème à ce Français quinquagénaire d’origines martiniquaise, bretonne et portugaise, au teint basané et aux longs cheveux tressés: “Dans ma vie, j’ai toujours fait ce qui me plaisait. Tant pis si ça choque”.
La musique, Mino Cinelu est tombé dedans quand il était petit: son père est musicien, et ses deux frères aînés sont aussi passionnés de musique. Il s’initie seul à la batterie et à la percussion, avant de prendre quelques cours au conservatoire: “A cette époque, ces instruments n’étaient pas courants, d’autant que j’en jouais comme l’aurait fait un gaucher”, se souvient-il.
Première scène au Carnegie Hall
Mino Cinelu part de chez lui très tôt, avec 35 francs en poche. Il apprend à se débrouiller. A 19 ans, il découvre New York pour la première fois, à travers un concert qu’il donne… au Carnegie Hall. Pas mal pour une première! Il part ensuite vivre à Londres durant une année. Et en 79, la petite vingtaine, le voilà de retour à New York. Sans un sou en poche, mais de la détermination à revendre. “Lorsque mes idoles donnaient des concerts en Europe, ce n’était pas facile de passer la sécurité pour les rencontrer à la fin des spectacles”.
Il poursuit : « Il fallait que je vienne à New York: c’était le seul endroit où je pouvais espérer rencontrer tous les musiciens qui m’inspiraient ». Comprenez George Benson, Miles Davis ou Frank Sinatra.”Maintenant, cela a un peu changé: avec les nouvelles technologies, si l’on veut se faire connaître et rencontrer ses idoles, on a moins besoin de partir à l’aventure ».
Dans un bar avec Miles Davis, en Amazonie avec Sting
Quand Mino Cinelu arrive à New York, il se retrouve seul: le groupe avec lequel il est parti, “Ice”, se désagrège à l’arrivée. Il commence alors à donner des cours de percussion dans le Queens et joue de la basse dans une église du New Jersey. Un soir, il donne un concert dans un club de jazz à Manhattan. “Je n’ai pas aimé ce concert. Les autres musiciens n’étaient pas professionnels, j’étais énervé, je n’avais qu’une envie: terminer le morceau et m’en aller”. Mais pendant la soirée, il remarque qu’un homme le fixe intensément. Lorsque Mino Cinelu quitte la scène, l’homme en question l’attrape par le bras et ne le lâche pas. Il lui demande de jouer des percussions pour lui. Mino Cinelu apprendra quelques instants plus tard son nom: Miles Davis. C’est le début d’une longue collaboration qui durera plusieurs années et donnera naissance à huit albums. Récemment, une proche du titan du jazz aurait confié au Français que Davis le considérait comme son sideman “préféré”. “Ca m’a beaucoup touché”, raconte-t-il (vidéo: Mino Cinelu avec Miles Davis)
Tout en parlant de ces rencontres décisives dans sa carrière et des morceaux qu’il a composés, Mino Cinelu se lève régulièrement pour jouer du piano. “Ce morceau, c’est celui que j’ai joué dans un festival de percussions, au Brésil. Ils étaient tous étonnés que je commence par jouer du piano, c’était génial”, explique-t-il. Des anecdotes à raconter, Mino Cinelu en a des tas: la fois où il a rencontré le saxophoniste américain Frank Foster en donnant des cours de batterie dans l’école de sa fille, celle où il est parti en Amazonie avec Sting pour la cause des indiens Shingu… Très souvent en tournée à l’étranger pour des concerts, le musicien ne s’arrête jamais.
New York, un port
Malgré tout, son lieu d’attache, c’est New York. L’artiste mène une vie de famille à Brooklyn et n’envisage pas de quitter les Etats-Unis. “Je vois New York comme un port qui me permet d’aller où je veux, explique-t-il. Ici, j’ai l’impression de ne pas être loin du Japon, où je donne de nombreux concerts, tout en étant proche de l’Europe, continue-t-il. Dans cette ville, on peut faire tout ce qu’on veut, écouter de la musique jusqu’à 5h du matin ou partir faire du roller à minuit. C’est extraordinaire!” s’exclame-t-il.
Son prochain projet: un concert au Lycée français de New York le 15 novembre, qu’il attend avec impatience. Le musicien jazz Jean-Christophe Maillard sera à ses côtés pour l’occasion. Il y aura également la musicienne de gospel Stefanie Minatee et son choeur, ainsi que la chorale du Lycée français. Sans compter les « invités surprises » que promet Mino Cinelu: “J’ai des amis qui seront peut-être à New York pour le concert et viendront jouer avec nous. Cela va être un concert de folie, je ne suis pas sûr que le Lycée franais s’y soit vraiment préparé”, s’amuse l’artiste. Pour cette soirée, comme à son habitude, il réserve bien des surprises.
Mino Cinelu avec Sting:
Concert au Lycée français de New York, le 15 novembre à 19h30. 505 East 75th street (au croisement avec York Avenue). Tarif étudiant: $15, plein tarif: $30. Réservations au (212) 439 3820
Voir le site internet de Mino Cinelu.