Arrivée à l’âge de deux ans aux États-Unis, suivant un père ancien CEO dans de grandes maisons de luxe, et une mère passionnée de mode et d’art, Joy Poirel est aujourd’hui Co-Présidente de la Production et Productrice Exécutive chez Illumination, l’un des plus grands studios d’animation au monde, où elle participe à la création de succès planétaires, ainsi de « Tous en Scène », en passant par « Moi, Moche et Méchant » (« Despicable Me »), « Les Minions », « Super Mario Bros » et « Migration », son film fétiche, dont la sortie est programmée fin décembre aux États-Unis.
« J’ai grandi aux États-Unis, fait mes classes à l’école américaine avant un retour choc en France à l’âge de 16 ans, tout en gardant en tête l’idée, un jour, de rentrer chez moi, raconte Joy Poirel. J’ai toujours évolué sans plan de vie, sans études particulières, mais avec le fantasme d’aller vivre à New-York et d’y faire ma vie. Alors après le bac, un stage en poche, je me suis installée dans Alphabet City, ai vécu mon moment avant de retourner à Paris par amour et de me lancer dans la musique, jazz et trip-hop, ma première passion. »
Intermittente au début des années 2000, on lui confie un premier job dans la société de production d’Edouard Baer, Les Films en Cabine. « Mes premiers pas dans le monde de l’audiovisuel, poursuit-elle. Rapidement, mon anglais courant m’a ouvert des portes. On m’envoyait sur tous les tournages de campagnes de publicité à l’étranger jusqu’à un coup de fil de Mac Guff Ligne (ndlr, studio basé à Paris et dédié à la fabrication des longs-métrages d’animation, alors remarqué pour « Azur & Asmar », « Chasseurs de Dragons »…). Embauchée comme interprète, je ne connaissais strictement rien au milieu et me suis finalement laissée aller. »
Séduite immédiatement par le métier et le talent des dessinateurs et des designers du studio, elle prend la direction de l’ « Art Dept », le département consacré à l’art, et dirige sa première équipe de créatifs sur la production de « Moi, Moche et Méchant », le film qui enregistra plus de 540 millions de dollars de recettes au box-office. « Un monde fascinant, où je me retrouvais entourée de beauté, de génie, de créativité en permanence. Une machine incroyable où chaque aventure d’équipe engage pour deux à cinq ans de travail. »
Aussi époustoufflé par la force créative des Français, Chris Meledandri, producteur de cinéma s’étant illustré chez 20th Century Fox et Blue Sky Studio (avec notamment « L’Âge de Glace », « Robots »…) et fondateur-CEO du studio d’animation Illumination, choisit naturellement la France pour créer son studio. Il trouve avec Mac Guff Ligne sa perle, et y produit « Moi, Moche et Méchant », son premier film sous l’enseigne Illumination. Le succès est retentissant, et en 2011, Mac Guff Ligne devient Illumination Mac Guff. « Le feeling est tout de suite passé, et deux ans après avoir commencé l’aventure, Meledandri m’embauchait à Los Angeles. »
Débarquée à Santa Monica en 2010, le retour aux États-Unis sera de courte durée. « J’ai eu du mal à m’acclimater, le job en marketing ne me réjouissait pas autant que le travail avec les équipes des films, et je décidais finalement de retourner en France, avec la grande chance de pouvoir ré-intégrer le studio parisien. J’ai enchaîné dans le département de l’animation sur “Moi, Moche et Méchant 2” puis “Minions“, puis avec mon premier poste de Directrice de Production avec “Tous en scène”. » Le succès est à nouveau au rendez-vous, avec plus de 640 millions de dollars de recettes. La personnalité de la jeune femme, son franc-parler et son anglais parfait séduisent le grand boss qui la convainc de retourner à Los Angeles en 2018, la nomme Co-Présidente de la production aux côtes de deux de ses collègues parisiens, et lui ajoute le rôle de Productrice exécutive deux ans plus tard.
« Avec du recul, je réalise que ma culture et ma personnalité française ont forcément joué un rôle dans ma carrière, confesse Joy Poirel. J’ai pour habitude de dire ce que je pense, de ne jamais avoir peur d’être directe, je défends les artistes et mes incroyables équipes de production bec et ongles, milite pour la diversité et la curiosité sans bornes, des traits de personnalité conjugués au bon goût français, qui m’ont probablement aidé à me faire remarquer. »
Désormais épanouie dans sa vie californienne, connectée tous les jours de 7am à 12pm avec le studio parisien, Joy Poirel a trouvé dans cette double vie, son équilibre. En parallèle de sa passion pour les films d’animation, la co-Présidente de la production d’Illumination cultive l’art de vivre à la française. Elle vient d’emménager dans le quartier de Silver Lake, s’est trouvée un groupe d’amis proches, « des expatriés comme moi, et des personnalités que je n’aurais sans doute jamais rencontrées à Paris” et rêve de mille projets. « Je ne sais pas de quoi se ferait demain, je ne fais pas de plan sur la comète. L’art me passionne par-dessus tout, et la positivité des Angelenos me pousse à aller au-delà de ma timidité, et à continuer de rêver. »