Parfois maltraité par la critique parisienne qui lui reproche ses « succès de librairie», c’est avec un réel plaisir que Michel Onfray s’apprête à s’envoler outre-Atlantique, à la rencontre du public franco-américain. « Il m’est arrivé, quand je faisais des conférences aux Etats-Unis, de m’entendre dire que ce pour quoi on me rendait la vie difficile à Paris m’aurait valu de l’autre côté de l’Atlantique un respect, voire de l’aide concrète » affirme le philosophe qui se rendra à L.A le 23 octobre, à San Francisco le 24 et à Washington le 29, pour y présenter son dernier livre « L’ordre libertaire : la vie philosophique d’Albert Camus », à l’occasion du centenaire de la naissance de l’écrivain.
« En France, on me reproche d’avoir des lecteurs, des auditeurs (…) de m’être fait loin de Paris, sans Paris, de rester fidèle à mon père ouvrier agricole et à ma mère femme de ménage par mes engagements politiques théoriques et concrets – par exemple, la création et l’animation bénévole d’une université populaire », à Caen.
En écrivant « L’ordre libertaire», Onfray affirme avoir eu « envie de redresser un tort », visant cette fois-ci, Camus. C’est parti d’« une conversation avec une personne qui tenait des propos indignes” sur l’écrivain et l’Algérie. “Sans le savoir, elle reproduisait la caricature fabriquée par Sartre en son temps pour le salir: Camus philosophe pour classe terminale, Camus penseur des petits blancs en Algérie, Camus défenseur du colonialisme, Camus boy-scout de la morale chrétienne… J’ai voulu écrire un livre sur le Camus politique pour montrer qu’il incarnait un socialisme libertaire qui lui valait, à cause de son socialisme, d’être critiqué par la droite, et à cause de son tempérament libertaire, d’être critiqué par la gauche marxiste, communiste, sartrienne, qui avait alors le monopole du champ intellectuel ».
“Camus concerne toutes les époques et tous les lieux”
Aux Etats-Unis, où L’étranger est l’un des romans français les plus étudiés, le philosophe estime que c’est avant tout l’universalisme camusien qui peut toucher le public américain. «Camus concerne toutes les époques et tous les lieux. Il a parlé, il parle et il parlera à tous pour toujours : il se demande comment on peut donner un sens à sa vie quand Dieu n’existe pas et que, conséquemment, l’absurde fait la loi. Il est un héraut – et un héros – de la liberté et de la justice, il ne veut pas l’une sans l’autre. Il pousse jusque dans ses conséquences ultimes cette idée magnifique qu’il n’y a jamais aucune bonne raison d’infliger la mort à un homme » détaille-t-il. « Il refuse les pouvoirs quand ceux-ci laminent la liberté et brutalisent la justice – autrement dit, tout le temps, car c’est la tentation de tout pouvoir, fut-il démocratique ».
Des idées qui pour le philosophe n’ont donc aujourd’hui rien perdu de leur pertinence :«tant qu’il y aura de la misère, de la pauvreté, de l’humiliation, autrement dit toujours, il y aura une nécessité absolue de mener un combat camusien ».
0 Responses
Deux heures absolument captivantes. Merci au Lycée Français. Il y avait quand même un coté surréaliste à écouter un tel discours applaudi par une audience qui n’en partage pas la moindre idée…c’est ainsi!