Fraîchement arrivée à New York avec son mari et ses trois enfants, Mathilde Thomas ne perd pas de temps. Elle a entamé avec enthousiasme la phase qu’elle appelle de « terrain » : elle parcourt les boutiques où sont vendus les produits Caudalie (500 dans le pays) à la rencontre de ses clientes. La semaine dernière, une grande affiche en vitrine de la boutique Sephora dans le Flatiron district annonçait sa venue. Lors d’animations, elle prodigue alors des conseils de beauté aux Américaines. Mathilde examine la peau de la cliente et livre son ordonnance : la crème anti-âge Premier Cru, la Vinoperfect pour l’éclat, etc. En à peine un mois, elle est devenue la nouvelle prêtresse française de la beauté.
L’histoire commence en 1993 quand la jeune femme, récemment diplômée de l’ESC Nice, visitait le vignoble de sa famille dans la région de Bordeaux. Avec son mari Bertrand, ils rencontrent le professeur Joseph Vercauteren, spécialiste des polyphénols, des molécules présentes dans les pépins de raisin. Ils ont l’idée de créer des cosmétiques anti-âge à base d’actifs issus de la vigne. C’était en 1995. «Caudalie est une société qui a atteint l’âge adulte. Elle a trouvé son modèle de croissance à travers le réseau de pharmacies en Europe». Pour continuer dans la lancée qu’ils ont initiée, ils ont confié les rênes à un directeur général au siège à Paris.
L’une des particularités du marché américain : il est téléguidé par les célébrités. Il suffit que la make up artist de Madonna commande l’Eau de Beauté (par 12 flacons) ou que Kirsten Dunst confie à un magazine féminin qu’elle est une inconditionnelle du sérum Vinoperfect. Bingo, les précieux élixirs deviennent des bestsellers.
Si le gros de l’activité est réalisé par la ventes de produits, la marque peut compter sur son spa à l’hôtel Plaza pour faire figure de porte drapeau. « Le spa, c’est mon défilé de haute couture», explique Mathilde. Ouvert en 2008 en pleine récession, le somptueux spa de 750m2 tenait un peu de la folie. Mais la marque a su passer entre les trombes de la crise, et le spa trouver sa clientèle : entre 200 et 300 clients s’y rendent chaque semaine, pour un gommage au Cabernet ou au Merlot ou un bain barrique. “Nous avons peu de clients de l’hôtel. Notre clientèle est surtout une clientèle locale new-yorkaise, la “community” comme on dit ici ». La crise a tout de même freiné la croissance globale : “en 2009 pour la première fois, nous avons réalisé une croissance à un chiffre”, explique Mathilde. Pour 2010, elle table sur un retour à une croissance à deux chiffres.
Le couple se donne cinq ans pour vivre son expérience d’expatriation et conquérir le marché. «Je ne fais pas de plans sur la comète. Je suis là pour trouver un modèle, bâtir la stratégie, évaluer un nouveau modèle de distribution dans le sélectif ». Le défi est périlleux : les grands magasins américains sont dans une mauvaise passe. Mathilde compte bien explorer les circuits de distribution alternatifs comme les dermatologues, les spas ou encore les chaînes de téléachat. Elle a récemment fait son show à l’antenne sur la chaîne QVC. Elle sourit : « Ca a boosté les ventes chez Séphora. A suivre…»