Mathilde Froustey a commencé sa vie de danseuse américaine en 2013, à l’aube de ses 28 ans, après quatorze années à l’Opéra de Paris où elle comptait parmi les espoirs de la compagnie nationale. « Ce n’était pas évident de démissionner de l’Opéra de Paris, c’est l’une des meilleures compagnies au monde ! ».
Lorsqu’elle s’installe à San Francisco, dans le quartier mexicain de Mission, la Française s’indigne des « loyers horriblement chers ». À force de voir ses « amis artistes » obligés de cumuler les petits boulots, en plus de leur travail de création, Mathilde Froustey a une généreuse idée : « déménager à Oakland et trouver un endroit assez grand pour aider et accueillir ma communauté ».
Une main tendue aux artistes
Blessée depuis janvier dernier, l’énergique expatriée a décidé de « transformer son malheur en chance » plutôt que de rester sur son « canap’ à regarder Netflix ». En mars, Mathilde Froustey a trouvé « La Maison » idéale, un loft de 185 m2 aux portes rouges, situé dans le quartier de Fruitvale, à Oakland. Elle ouvrira officiellement ses portes le samedi 27 mai.
« Il y a du monde tous les jours à La Maison. L’espace de vie est complètement transformable, les meubles sont sur roulette », détaille la danseuse qui n’a qu’une seule volonté : « que les artistes se sentent chez eux et se rencontrent ».
Mathilde Froustey a fait ses premiers pas de danse à Dax à l’âge de 9 ans. « La danse classique, je trouvais ça girly, alors que j’étais plutôt tomboy ». La Landaise persévère et devient petit rat de l’Opéra de Paris à 14 ans. Kitri dans Don Quichotte, le rôle-titre dans Giselle ou encore Clara dans Casse-Noisette… La jeune femme excelle sur scène mais échoue, à plusieurs reprises, au concours interne pour décrocher le titre suprême de danseuse Étoile. « Je n’arrivais pas à être promue alors que je dansais des rôles principaux », dit-elle, encore un peu amère.
À l’hiver 2013, la danseuse malchanceuse au concours décide de tenter sa chance outre-Atlantique. « Je commençais à devenir aigrie, je sentais qu’il fallait du changement », se souvient-elle. Alors qu’elle est en vacances à la montagne sans même pouvoir skier – précaution oblige -, Mathilde Froustey fait un appel du pied au San Francisco Ballet (SFB). « Helgi Tomasson (le directeur du SFB, Ndlr) m’a répondu le lendemain. J’étais prise sans même passer d’audition ! ». Quatre ans plus tard, Mathilde Froustey brille toujours sur les planches du SFB en tant que “principal dancer” (l’équivalent aux Etats-Unis du danseur étoile à Paris).
L’artiste veut que sa Maison soit « un lieu pour créer, répéter, faire des séances photos, des tournages, des expositions», explique-t-elle, en précisant qu’elle ne fait payer aucun loyer aux résidents éphémères. L’espace accueillera deux ou trois artistes en résidence, avec un roulement tous les deux mois minimum.