Il s’est pris un café à emporter mais deux heures plus tard, Mathieu Templon ne l’avait pas encore touché. Il faut dire que le galeriste de 36 ans est par monts et par vaux. En ce mercredi 7 septembre, lui et son équipe apportent les dernières touches à la nouvelle galerie Templon à New York, avant son vernissage inaugural, le soir même – une exposition de l’artiste sénégalais Omar Ba.
Aucun détail ne doit être laissé au hasard. La nouvelle adresse est la première antenne américaine de la fameuse galerie parisienne créée par le père de Mathieu Templon, Daniel, en 1966. Depuis sa fondation, elle a représenté et exposé les plus grands – Richard Serra, Willem de Kooning, Andy Warhol hier, David Lachapelle, Kehinde Wiley ou encore Prune Nourry aujourd’hui – , jouant un rôle non-négligeable dans la présentation de talents américains au public français dans les années 1970 et 1980, à l’heure où ils étaient peu connus.
Pour ce nouvel espace new-yorkais, elle a élu domicile dans un bâtiment à trois niveaux au coin de la 27ème rue et de la Dixième Avenue à Chelsea, au cœur de quartier des galeries. « J’ai toujours eu une passion pour New York. Elle est depuis très longtemps la capitale du monde de l’art contemporain », explique Mathieu Templon, assis dans son bureau flambant neuf.
Cette aventure est une sorte de retour aux sources pour le Français, qui a fait ses armes dans plusieurs galeries locales reconnues comme David Zwirner et Metro Pictures, localisées à Chelsea. Avant de partir s’installer à Bruxelles en 2015, où il s’est occupé du lancement de la galerie Templon locale, il a travaillé pendant trois ans pour la Sean Kelly Gallery, située elle aussi à quelques rues de l’adresse new-yorkaise qu’il supervise aujourd’hui. « Quand je suis reparti en Europe, je savais au fond de moi que je reviendrai. L’envie ne m’a jamais quitté ! ».
Pour renforcer sa présence à l’international, Templon a d’abord envisagé Londres, mais le choix s’est progressivement porté sur New York où certains de ses artistes « jeunes ou à mi-carrière », comme le Chilien Iván Navarro ou la Japonaise Chiharu Shiota, sont peu ou pas représentés. Des voix que Mathieu Templon, qui a entrepris de rajeunir l’image de la galerie familiale, est décidé à faire entendre. Ainsi, l’exposition inaugurale, visible jusqu’au 22 octobre, marquera les débuts news-yorkais d’Omar Ba, dont les peintures engagées interrogent la place de l’Afrique dans le monde. À partir du vendredi 9 septembre, l’un de ses travaux sera aussi montré au FIAF dans le cadre du festival pluridisciplinaire Crossing the Line, et en novembre, le Baltimore Museum of Art lui dédiera une exposition personnelle.
Cette antenne new-yorkaise est aussi une manière de se rapprocher des collectionneurs américains avec qui la galerie travaille. « La plupart se trouve à New York », précise le directeur. « Avec la pandémie, certains ont dit que la ville avait perdu un peu de son attractivité. Je ne le pense pas. Au contraire, c’est le bon moment de s’y installer. Nous voulons participer à sa renaissance. »
Un pari sous forme de défi personnel pour Mathieu Templon, qui écrit ainsi le prochain chapitre de l’entreprise de son père, venu lui prêter main forte pour l’ouverture. « Il m’a emmené toute sa vie dans ses voyages d’affaires. J’ai eu la chance de rencontrer des dizaines et des dizaines d’artistes figurant parmi les meilleurs et de voir des centaines de musées dans le monde entier, raconte Mathieu Templon. Je me suis toujours dit que c’était le plus beau métier du monde ». Même si cela signifie boire son café froid.