Isabelle Huppert n’est pas la seule Française à avoir les Oscars en ligne de mire cette année. Fraîchement récompensée à la dernière cérémonie des BAFTA Awards à Londres, la costumière Madeline Fontaine est elle aussi en lice pour la fameuse statuette dorée hollywoodienne.
Depuis la sortie du film franco-américano-chilien “Jackie” réalisé par Pablo Larrain, la costumière française est très sollicitée. Et pour cause, ses créations pour le long-métrage dédié à la légendaire “First Lady”, épouse de JFK, lui ont valu une pluie de nominations et de récompenses. Primée aux BAFTA Awards, aux Satellite Awards, et aux Critics’ Choice Movie Awards, Madeline Fontaine assistera à la prochaine cérémonie des Oscars où elle se verra peut-être récompensée pour la meilleure création de costumes.
Côté français, la créatrice a déjà été nommée sept fois par l’Académie des César. Elle en possède déjà deux sur sa cheminée et en gagnera peut-être un troisième pour ses costumes dans “Une Vie” de Stéphane Brizé lors de la prochaine cérémonie, le 24 février.
Quand on lui parle de ses récompenses, Madeline Fontaine explique qu’elle “ne travaille pas pour ça. C’est plutôt l’exigence de faire les choses au mieux, c’est un but en soi. Cela occasionne des choses positives. On ne peut pas dire que ce n’est pas important d’avoir la reconnaissance de ses pairs”.
Tournée principalement en France, aux studios de Saint-Denis, “Jackie” retrace les jours qui ont suivi l’assassinat de John Fitzgerald Kennedy en 1963. Le long-métrage se centre sur la préparation des funérailles du Président et donc sur le deuil brutal de la Première Dame.
Pour “Jackie”, Madeline Fontaine a donc recréé les tenues de l’iconique First Lady, notamment le tristement célèbre tailleur rose Chanel porté le jour de l’assassinat de son mari, reproduit en plusieurs exemplaires pour les besoins du tournage. “C’était un joli projet. Un peu délicat aussi parce que travailler sur un film aussi fort, ancré dans la mémoire collective et dans l’histoire américaine, ça aurait pu être casse-gueule”, confie la créatrice.
Le monde du cinéma, Madeline Fontaine y baigne depuis plus de 30 ans. “Je ne viens ni de la couture, ni de la mode. Je viens des écoles d’art. Je suis arrivée dans le cinéma par chance (plutôt que par hasard). J’ai été appelée à aider une costumière sur “L’été meurtrier” en 1983. J’ai découvert un univers dans lequel je me suis dit que j’avais peut-être ma place à gagner. J’ai appris le métier. Je me suis formée auprès d’autres créateurs de costumes et j’ai fini par travailler en mon nom”, raconte Madeline Fontaine.
Dans les années 1990, la costumière rencontre le réalisateur Jean-Pierre Jeunet et crée les costumes pour “La Cité des Enfants Perdus” puis pour “Le Fabuleux Destin d’Amélie Poulain”. “Cela a tout de suite mis mon travail dans une autre dimension et dans une autre vitrine. Cette rencontre a été vraiment fondatrice et un moment clé”, explique Madeline Fontaine. Le réalisateur fera par la suite appel au talent de l’habilleuse pour ses long-métrages.
Jusqu’à “Jackie”, Madeline Fontaine a travaillé quasi-exclusivement sur des films français, mais son avenir américain la laisse perplexe. “Pour l’instant, je n’ai eu aucune proposition qui m’ait vraiment tenté. Ça peut arriver. Jusque-là, les productions américaines ne me connaissaient que de loin […] Si “Jackie” m’ouvre sur des choses intéressantes, sur un plus large éventail des possibles, tant mieux”.
Le 26 février, Madeline Fontaine se rendra donc à Los Angeles pour la 89ème cérémonie des Oscars. En marge de l’événement, la costumière a reçu de nombreuses invitations, notamment à UCLA pour une conférence avec les “costume designers” de l’année. “Même si je repars les mains vides, ces moments là sont forcément riches et intéressants“.
L’occasion aussi pour elle de mettre en lumière les métiers du cinéma, parfois dans l’ombre. “Je trouve que ces métiers sont souvent méconnus. Mais les difficultés qu’il peut y avoir à les pratiquer, la précarité de beaucoup d’entre nous, sont parfois ignorées. Les gens ne perçoivent que le côté visible de l’iceberg » explique la costumière qui préside aussi, depuis sa création, l’Association Française des Costumiers du Cinéma et de l’Audiovisuel (AFFCCA).