“Nous attendons de voir ce que demain nous apporte“. Comme beaucoup de membres de l’UMP aux Etats-Unis, Damien Regnard, conseiller AFE pour le Texas, l’Oklahoma, la Louisiane et l’Arkansas, attend.
Il attend et observe de loin Jean-François Copé et François Fillon s’entre-déchirer pour la présidence du parti. Et le “théâtre médiatique” auquel il assiste depuis plus d’une semaine maintenant ne lui plaît pas. “On a la chance d’être loin du matraquage médiatique, souligne-t-il. Mais on se dit qu’il y a du boulot. Surtout qu’il y a matière à se rassembler: la récente perte du AAA, l’enterrement du rapport Gallois, etc.“
La crise à l’UMP ne fait pas seulement parler en France. En Amérique du nord, où le parti a été défait lors des dernières législatives, aussi, on commente ce duel qui n’en finit pas. Yann Coatanlem, délégué adjoint de l’UMP Côte est se dit “choqué par ce qui se passe“. Pro-Fillon, “comme la majorité des Français de l’étranger“, il a appelé sa délégation, forte de quelque 300 membres, à ne pas céder à la division, comme en métropole. “J’ai demandé à chacun d’éviter les commentaires favorables à l’un ou l’autre candidat sur les réseaux sociaux“, précise-t-il.
“Il y a eu quelques prises de positions individuelles, mais de manière générale, il ne s’est pas passé pas grand chose, ajoute Nicolas Puygrenier, responsable des jeunes UMP de la côte est. On va voir ce qui va se passer en France“.
Les UMP-istes nord-américains sont-ils copéistes ou fillonistes? Impossible de le savoir. Leur vote, qui s’est fait par correspondance, est comptabilisé dans la catégorie générale “vote par correspondance des Français de l’étranger et d’Outre mer“. Selon les résultats proclamés par la Commission nationale des recours, François Fillon devance Jean-François Copé auprès de cet électorat (849 voix contre 759). Pour pouvoir voter, il fallait être membre de l’UMP et à jour sur les cotisations. Mais sur le continent américain comme en métropole, l’organisation a laissé à désirer. “De très nombreux électeurs n’ont pas reçu le matériel de vote” assure Yann Coatanlem.
Pour François Lubrina, ex-délégué UMP au Québec, suspendu pour avoir soutenu Julien Balkany plutôt que Frédéric Lefebvre, candidat officiel de l’UMP lors de la dernière législative en Amérique du nord, la multiplication des candidatures de droite dans la circonscription laissait présager de la crise actuelle. “Lors de la législative en Amérique du nord, il n’y pas eu de processus de consultation de la base pour choisir le candidat. On a vu les résultats. Depuis, il n’y pas eu d’analyse post-mortem, juge-t-il. L’UMP est une machine formidable qui est enrayée actuellement.“
Si les leaders de l’UMP dans la circonscription suivent avec attention le déroulé de l’élection, c’est aussi parce que l’avenir de leur délégation en dépend. Contrairement à Jean-François Copé, François Fillon formule sur son site de campagne des propositions pour améliorer la fédération des Français établis hors de France de l’UMP, qui compte quelque 3.000 membres selon le Point.fr. Il parle notamment de “donner des moyens et un budget pour que les délégations puissent vivre” ou “inviter les parlementaires et personnalités politiques à rencontrer les adhérents à l’étranger“. Le site de campagne de M. Copé est vierge, lui, de telles propositions alors que ses liens avec l’étranger ne manquent pas: le député-maire de Meaux est président du groupe d’amitié France-Etats-Unis à l’Assemblée nationale et listé comme soutien du Club Praxis, un think tank d’expatriés co-parrainé par Guy Wildenstein, patron de l’UMP côte est (et proche de Nicolas Sarkozy). Il compte, en outre, dans son équipe de campagne un certain Edouard Courtial, secrétaire d’Etat chargé des Français de l’étranger sous Sarkozy. En janvier, devant la fédération des Français hors de France de l’UMP, Jean-François Copé avait exhorté les militants hors de France à augmenter le nombre d’adhésions dans leurs pays respectifs. “Le potentiel militant parmi ceux que vous côtoyez est innombrable“, avait-il lancé. Et aujourd’hui?
Emmanuel Saint-Martin et Alexis Buisson