Revue de presse. Aux Etats-Unis, il n’y a pas que Frank Underwood qui réagit à la loi El Khomri (ou “Loi travail”). La presse aussi s’y intéresse.
Plusieurs titres américains rapportent les difficultés du gouvernement de Manuel Valls à faire passer cette loi controversée, adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale jeudi après le recours à l’article 49.3. Pour l’Associated Press, la réforme est la “plus audacieuse qu’un gouvernement français, de droite ou de gauche, a tentée depuis des années et a causé des manifestations parfois violentes dans les vignobles comme dans les banlieues” . L’agence souligne cependant que le texte “est relativement modeste, surtout depuis que le gouvernement l’a allégé pour répondre aux demandes des syndicats.”
Un texte modifié certes, mais qui “coûte beaucoup au président français sur le plan politique” selon le Wall Street Journal, pour lequel l’usage du 49.3 a “accru la division du parti socialiste à un an de l’élection présidentielle. ” Le Washington Post va dans le même sens. Comparant les manifestations anti-Loi travail aux “révoltes étudiantes de mai 68” , le quotidien américain décrit l’opposition de certains députés socialistes comme “le désaveu public d’un gouvernement de plus en plus impopulaire, vu comme politiquement impuissant et en décalage par rapport aux intérêts de ses propres supporters.”
Le New York Times a déjà scellé le sort de François Hollande. “Si les sondages cités dans les médias français sont crédibles, les électeurs l’ont abandonné depuis longtemps, lui et son sourire rassurant qui semblait synonyme d’un nouveau départ pour la France il y a quatre ans. A l’image du chat Cheshire (personnage d’Alice au pays des merveilles, ndr), son sourire pourrait bien être la seule chose qui restera de lui.”
“Un système défaillant”
Dans une chronique, l’Américaine vivant en France Pamela Druckerman affirme que “la loi, affaiblie après de longues négociations, ne changera pas le système” et se demande ouvertement: “Pourquoi les Français sont-ils tellement attachés à un système défaillant” . Son explication: ils “pensent que l’emploi est un droit fondamental, garanti dans le préambule de la Constitution – et que faciliter le licenciement est un affront à ce principe. Sans CDI, vous êtes considéré comme nu face aux forces indifférentes du capitalisme.” Aussi, “les débats économiques sont souvent présentés comme des luttes politiques” , où les faits économiques s’effacent devant les personnalités.
Cette résistance au changement se produit alors que les Français sont malheureux au travail selon la chroniqueuse, qui utilise l’exemple d’un ami en CDI mis au placard et les accusations d’harcèlement et d’agressions sexuelles contre le Vert Denis Baupin. Elle va jusqu’à qualifier de “misérable” le quotidien des employés français. “Quelle que soit l’action du gouvernement, l’emploi est de moins en moins sûr” estime-t-elle. “Je ne veux pas affronter le capitalisme désarmée non plus, mais il doit y avoir un juste milieu entre la rue et le placard.” La France le cherche mais ne l’a pas trouvé.