« C’est une école qui a beaucoup de mérite et dont les enseignants sont extraordinaires ! ». La deadline des inscriptions en middle school approche à grands pas (c’est le 1er mars), et Diane Re veut s’assurer que les familles françaises de New York choisissent MS 256. Car, selon elle, le programme bilingue de ce collège de l’Upper West Side, également appelé Lafayette Academy, manque de petits Francophones. Dans la classe de 6th Grade (6e), où se trouve l’un de ses enfants, il n’y a que sept élèves qui maîtrisent la langue de Molière. « Les autres ne peuvent pas suivre l’enseignement en français car ils ne comprennent pas la langue », regrette-t-elle.
Pour la maman, c’est la faute de la pandémie, qui a poussé de nombreuses familles expatriées à retourner au bercail, mais aussi à la décision de Bill de Blasio de suspendre les procédures de sélection (screening) dans tous les collèges et lycées publics de New York. Or, les programmes bilingues reposent en grande partie sur des tests linguistiques pour remplir les classes de Francophones et d’Anglophones. Faute de dispositif en 2021, la Lafayette Academy a donc procédé à une loterie. « Tout le monde pouvait postuler, donc le pool d’élèves parlant français a été dilué », explique Diane Re.
Au total, près de 200 collèges publics à New York utilisaient des procédures diverses pour choisir leurs élèves (entretiens, évaluations comportementales, assiduité, résultats scolaires…). Leur suspension a été décrétée en décembre 2020 par l’ex-maire pour garantir l’accès à tous aux meilleurs établissements publics sur fond de retards d’apprentissage causés par la Covid et d’appels à une plus grande équité dans le sillage du meurtre de George Floyd. En effet, le système scolaire new-yorkais est considéré comme l’un des plus ségrégués des États-Unis.
Si la décision a été prise au nom de « la diversité et de l’équité », Fabrice Jaumont, attaché éducatif aux Services culturels de l’Ambassade de France à New York, regrette que les besoins des programmes bilingues n’ont pas été pris en compte. « Il est difficile de savoir ce que fera le nouveau maire, Eric Adams. Vu son profil, sa politique sera probablement orientée vers l’accès », avance-t-il.
Les middle schools qui proposent des filières bilingues (Boerum Hill School for International Studies, Fort Greene Prep…) n’ont pas répondu à nos demandes de commentaires sur leurs situations respectives.
À NYFACS, l’école à charte franco-américaine de Harlem (Pre K-8th Grade), on ne pratique pas de tests, mais une sélection par loterie (inscriptions avant le 31 mars). Ici, c’est la demande qui pose problème. Touché par une baisse d’effectifs à cause de la crise sanitaire, l’établissement n’est rempli qu’à la moitié de sa capacité d’accueil d’environ 500 places. Mais son proviseur, Bertrand Tchoumi, se veut optimiste. « Cette année, nous avons connu une augmentation d’une dizaine d’élèves. On a donc de l’espoir. Avec la pandémie, nous n’avons pas pu nous déployer sur le terrain comme dans le passé. Mais nous sommes en train de reconstituer nos équipes », dit-il.
À la Lafayette Academy, le proviseur Brian Zager comprend la suspension du screening. « Au vu des lacunes d’apprentissage pendant la Covid, de tels tests auraient été difficilement justifiables ». Lui aussi se montre positif. « Il y a une grosse demande pour le programme bilingue. Il apporte beaucoup de bonheur à notre communauté de monolingues, dit-il. Mon rêve est de créer un lycée multilingue public qui offrirait un programme de Baccalauréat International (IB) car la plupart des écoles qui proposent ce genre d’enseignement sont privées. Il faut rêver grand ! »