« Quand on allume la télévision et qu’on voit toute cette confusion, bien sûr ça nous fait mal, » dit un Marocain de Casablanca à New York depuis une dizaine d’années. « Si c’était une synagogue, cela ne gênerait personne », ajoute-t-il.
Un échantillon d’une demi-douzaine de musulmans français et francophones à New York n’est pas représentatif de l’ensemble d’une communauté (600 000 musulmans résident à New York et ses banlieues; on ne connait pas le nombre de Français musulmans à New York car le recensement n’a pas une approche religieuse). Mais les conversations traduisent une inquiétude de voir leur religion associée à l’extrémisme. « Ce qui est véritablement horrifiant, ce qui ressort des débats, des joutes politiques et des saillies journalistiques, c’est l’amalgame entre islam, islamisme, terrorisme, etc. », s’indigne Yassine Cherkaoui, un Marocain, diplômé d’HEC et actuellement en master de relations internationales à l’université de Columbia.
A l’approche des élections de mi-mandat aux Etats-Unis, les musulmans new-yorkais dénoncent l’appropriation politique du sujet, du «pain béni» pour les Républicains, selon la Française d’origine tunisienne. Ils saluent le “courage” de Barack Obama et la prise de position de Michael Bloomberg en faveur de la mosquée, conscients du coût électoral que cela suppose. “Je trouve que Bloomberg a eu plus la posture d’un homme d’état que d’un politicien, ce qui est tout a son honneur », souligne Yassine.
Nombreux sont ceux qui égratignent au passage la politique d’immigration de Nicolas Sarkozy. «En France, l’affaire des minarets suisse et son utilisation par le Front National montre qu’il y a des points politiques à gagner en instrumentalisant la peur et l’amalgame entre Islam et extrémisme ». Yassine ajoute cependant: « L’impression que j’ai, totalement subjective, c’est que le pays connait mieux l’Islam que les USA et que de fait, la population en majorité est moins susceptible de succomber aux discours anti-musulmans. »
“Non!,” répond Radouane Eljaouhari, propriétaire du restaurant marocain Zerza dans l’East Village. « La France n’est pas les Etats-Unis. Les musulmans sont bien intégrés ici. Ils ont une perspective, un futur. Les grandes entreprises aux Etats-Unis n’attachent pas d’importance à votre nom ou votre religion. » Avec un optimisme tout américain, il conclut :« Il y a beaucoup de confusion. Ce [nouvel épisode] est une opportunité pour l’Islam de sortir de l’obscurité et pour les Américains d’apprendre sur notre religion.»