(Voir aussi la vidéo “Corner interview” de Riad Sattouf)
A priori, les gosses de Riad Sattouf ne sont pas si beaux que ça : coiffures improbables, vêtements ringards, acné galopante… « C’est un titre ironique oui, mais pas tant que ça », raconte le réalisateur. « Je voulais montrer que ces enfants, malgré leur physique ingrat, sont quand même de beaux enfants ». Hervé et Kamel, 14 ans, sont deux adolescents moyennement intelligents et hantés par des pulsions inapaisées. Malheureusement, avec les filles ça ne marche pas vraiment. L’adolescence semble être un thème qui fascine Riad Sattouf qui en parlait déjà dans Manuel du puceau avec un humour décapant. Mais à travers l’adolescence, c’est le thème de l’adaptation que le réalisateur cherche réellement à explorer. « L’adolescence, c’est le passage où tous les êtres humains s’adaptent à un nouvel environnement, qu’ils ne comprennent pas, et qui ne les comprend pas non plus».
Après des films présentant l’adolescence comme un état de grâce tels La belle personne ou encore LOL, Les beaux gosses renouvelle le genre du teen movie français. Ici, l’adolescence est un moment difficile à passer, parfois cruel, auquel on survit tout de même. « Si les gens comprennent ça de mon film, je suis heureux. Je voulais avant tout faire un film sincère ». Les beaux gosses est donc un film original, irrésistible, mais surtout authentique. A tel point qu’il est assez facile de s’identifier à l’un des ados du film. « Pour moi, c’est Kamel, nous dit-il. Mais sans le mulet ! » Pour cela, Riad Sattouf a volontairement fait le choix de brouiller les pistes quant à l’époque à laquelle se déroule le film. Ainsi, Kamel, l’ado au mulet, écrit une disserte sur le rappeur 50 cents et échange avec son meilleur ami Hervé des catalogues de la redoute datant des années 1980. « Je voulais recréer un contexte temporel qui s’apparente au film afin qu’il soit le moins putassier possible» nous explique Riad Sattouf. Les beaux gosses n’est donc pas un film sur la société d’aujourd’hui, mais sur les émotions et les interrogations de toujours.
Parmi ces interrogations, le sexe est évidemment central. Quand sa copine critique sa « technique de roulage de pelle », Hervé répète devant le miroir, et se fait coincer par sa mère, qui s’intéresse beaucoup trop à la sexualité de son fils. On pourrait croire que les acteurs principaux du film, Vincent Lacoste et Anthony Sonigo, respectivement 17 et 18 ans, auraient pu éprouver quelques difficultés à se lâcher devant la caméra. « C’est tout le contraire, commente Riad Sattouf, parfois je n’arrivais plus à les arrêter. Ils se sont bien éclatés je crois. C’est drôle de constater qu’en réalité c’est plus difficile pour des adultes d’aborder ces sujets.»
Compliqué pour un auteur de BD de se lancer, à 31 ans, dans le cinéma? « J’ai fait des études de cinéma donc j’y pensais déjà. La productrice du film m’a présenté le projet, c’était une super idée, alors je l’ai fait. C’est pas plus compliqué que ça. » Après Cannes, le succès en salle, un César et une présentation à New York, on peut se demander si Riad Sattouf a la droit de commencer à se sentir enfin beau gosse : « Pour l’égo c’est bien…c’est très bien même. Mais les prix ou le nombre d’entrées, ce n’est pas si important. Je veux surtout qu’on comprenne mon travail. »
(Voir aussi la vidéo “Corner interview” de Riad Sattouf)
0 Responses