“La prêtresse du bilinguisme“. C’est le surnom que l’on donne à Ofelia García. Professeur d’éducation urbaine et de littérature hispanique et luso-brésilienne au Graduate Center de CUNY (City University of New York), cette experte ès éducation bilingue est l’un des plus grands défenseurs du bilinguisme dans les salles de classe américaines. Entretien.
French Morning : Le bilinguisme a-t-il sa place dans une nation réputée monolingue comme les Etats-Unis ?
Ofelia García : L’éducation bilingue aux Etats-Unis a une longue histoire. Elle est née du combat pour les droits civiques afin d’intégrer les non-anglophones dans les écoles. En 1968, il y a eu le Bilingual Education Act. Mais cette mesure, à la différence d’autres pays comme le Pays de Galles où l’éducation bilingue a été utilisée pour promouvoir à la fois le gallois et l’anglais, visait à soutenir l’anglais uniquement. Certes, nous avons fait des progrès pour promouvoir les programmes « dual language » bilingues et d’immersion. Mais il en faut plus.
Pourquoi cette lenteur ?
En tant que nation, nous ne sommes pas à l’aise avec le bilinguisme. Le mot bilinguisme a disparu de nos lois et de nos espaces de travail. Historiquement, les immigrés venant aux Etats-Unis basculaient dans l’anglais après trois générations. Mais ce temps est révolu. Les flux internationaux de personnes et de biens qui se sont développés à travers la technologie et le trafic aérien ont changé la donne. Les immigrés d’aujourd’hui veulent être bilingues.
Il y a un autre problème : la crainte des parents que leur enfant fera moins bien aux tests d’anglais, qui permettent d’accéder aux lycées spécialisés et à l’université. Les lignes sont en train de bouger, l’attitude est plus positive. Mais l’intérêt est-il suffisant étant donné notre position sur la scène internationale ? Non.
Quand on parle d’éducation bilingue aux Etats-Unis, on pense avant tout aux immigrés hispaniques et asiatiques, moins aux francophones. Le français peut-il percer ?
Le français est langue prestigieuse avec laquelle les Américains sont à l’aise. La culture française n’est pas aussi « menaçante » dans leur esprit que celles des Hispaniques ou des Chinois. Ça ouvre un chemin. Et c’est important car le plus de langues sont parlées, le mieux se porte la cause bilingue. C’est une bonne chose aussi pour l’ensemble du monde francophone. En effet, les enfants originaires d’Afrique de l’Ouest ont les scores de maths les plus bas. Je dis souvent : « Heureusement qu’il y a les langues coloniales ! ». Si le français était utilisé par les enseignants dans leurs écoles, l’enfant pourrait être aidé.
Quels sont les défis que vous identifiez pour promouvoir le bilinguisme dans les salles de classes ?
Le plus gros défi est la manière dont nous continuons de définir l’éducation américaine. Elle se définit en anglais seulement. Si le bilinguisme n’est pas reconnu pour sa valeur intellectuelle, cognitive et sociale, il n’y aura pas assez de parents susceptibles d’essayer. Car inscrire son enfant dans un programme bilingue demande un certain courage. Il faut le vouloir et se dire que l’enfant aura de bonnes notes aux examens d’anglais.
Bien entendu, l’école n’est pas la seule manière de rendre l’enfant bilingue. Cela se passe dans les familles, au parc, dans les communautés, dans les programmes after-school… Mais l’école est nécessaire pour arriver à des niveaux d’alphabétisation supérieurs. Toutes les communautés bilingues devraient faire pression sur les éducateurs influents et les décideurs politiques pour qu’ils le comprennent. Mais les jeunes adultes en ce début de XXIe siècle sont plus à l’aise avec les autres langues. Cela fait partie de leur identité cosmopolite. On ne peut plus arrêter les Américains bilingues.
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J’ai coutume de dire qu’il ne faut pas faire le travail que l’école va faire. Disposer d’une école bilingue est une chance inouïe pour mener à bien un projet de bilinguisme précoce. Et l’école l’aide à transférer des notions d’une langue à l’autre pour équilibrer les champs sémantiques dans les deux langues car on ne parle de la même chose à la maison. (Voir http://blog-bilinguisme.fr/transfert-enfant-bilingue/)
TB analyse Madame, qui pointe du doigt les parents. Combien de latinoaméricains ne font pas l’effort de ne parler qu’espagnol (ou portugais) à la maison à leurs enfants ? ou, plus exactement : l’effort de pousser leurs enfants à apprendre leur langue maternelle, au lieu d’aller à la facilité de l’anglais (car c’est la langue de leur journée de travail à l’école)… Résulat : un baragouinage bien connu par exemple chez les Portoricains établis sur le continent…
Ce pays n a pas besoin d être bilingue! Conceder plus de place a l espagnol serait une grave faute. Certain hispaniques mènent un veritable jihad hispanique non pas pour le bien de leur enfant ou de leur pays comme un enrichissement culturel mais comme in acte d’envahissement et de conquete.