Pendant près d’une semaine, les voix de près d’un millier de ténors ont résonné dans l’hôtel Loews à Miami Beach. Il ne s’agissait pas de chanteurs mais bien d’avocats, venus participer du 31 octobre au 4 novembre au 55eme congrès de l’U.I.A, l’union internationale des avocats. Cette association a été fondée en Europe, en 1927, et a installé son siège administratif à Paris. «Ce fut une semaine très studieuse», selon le Président de l’UIA, l’avocat suisse Pascal Maurer, qui explique le choix de Miami : «Miami est une ville multiculturelle et multilingue, tout comme notre organisation».
L’UIA compte environ 2.000 membres individuels et quelque 200 membres «collectifs», dont la plupart des Barreaux nationaux, ce qui fait grimper le nombre réel d’adhérents à plus de 4,5 millions. Pour ce 55eme congrès, ils étaient venus de 83 pays repartis sur les cinq continents. Trois langues «officielles» sont traditionnellement pratiquées: le français, l’anglais et l’espagnol. Pendant la durée des travaux, tous les échanges se sont effectués dans ces trois langues, ce qui, avouons-le, conduit à une certaine gymnastique intellectuelle!
Les avocats, premiers citoyens du monde ?
Le choix de Miami (et des Etats-Unis) n’est pas anodin. Depuis sa création, l’UIA milite contre la peine de mort. Puis, l’un des thèmes-phare de ce congrès était: «Faut-il juger les terroristes comme des criminels ordinaires?» Miami n’est pas très loin de Cuba… et de Guantanamo… C’est un avocat américain, Stephen L. Dreyfuss, qui a mené le débat sur ce thème. Un débat difficile, mais riche, en raison des avis divergents qu’il a suscités. Certains ont questionné la réponse américaine aux attaques du 11-Septembre. Un ancien avocat de l’armée américaine a cru bon de préciser, concernant Guantanamo, que les Américains « ne sont pas en guerre contre le terrorisme, mais contre Al Qaida». Un ancien bâtonnier du Barreau de Paris s’est voulu plus consensuel, notant que « c’est un thème qui interpelle, bien sûr, les Américains, mais aussi le monde entier».
De l’avis général, ce 55eme congrès a permis d’aborder des thèmes de discorde, mais il a surtout donné l’occasion à tous les participants d’apprendre à mieux se comprendre et d’appréhender les différences culturelles qui forment les droits nationaux. Une session a ainsi été consacrée au droit islamique et à son évolution. Un intervenant saoudien a évoqué la question de l’ancien président Ben Ali, réfugié dans son pays. Au nom des Droits de l’Homme? Il a aussi évoqué le droit des femmes, insistant par exemple sur le fait que, dans le droit saoudien, aucun texte n’interdit à une femme de conduire une voiture… et pourtant. « Il s’agit d’un formidable programme de formation permanente des avocats » selon Pascal Maurer. Les avocats seraient-ils les premiers citoyens du monde?
Photo: Pascal Maurer, le président de l’UIA et Stephen L. Dreyfuss (crédit: Jacques-Yves Tapon)