Le succès éclatant d’« Anatomie d’une chute » de Justine Triet et Arthur Harari, nominé dans 5 catégories, a quelque peu éclipsé les autres productions françaises en lice aux Oscars, ce dimanche 10 mars à Los Angeles. Pourtant, cette année, le cinéma tricolore brille à Hollywood, avec la nomination de deux courts-métrages d’animation, d’un documentaire et d’un film long d’animation, la plupart réalisés par des femmes.
Pour elles et eux, le sacre de leurs films est le fruit d’années de persévérance, de collaborations internationales dans certains cas, et de longues campagnes de promotion… French Morning vous parle de ces pépites que l’on guettera aux Oscars, et vous dit comment les voir.
C’est l’un des deux courts-métrages d’animation français sélectionnés parmi 5 finalistes. Derrière l’histoire banale de Louise, 9 ans, en vacances à la campagne chez ses grands-parents, « Pachyderme » s’empare avec force du tabou de l’inceste. Un film coup de poing de 11 minutes, fruit de 5 ans de production. Il est signé de la jeune réalisatrice et illustratrice Stéphanie Clément, passée par la MoPa, l’une des premières écoles d’animation 3D de France, à Arles. Son univers graphique onirique a inspiré le scénario du film à Marc Rius, son ancien professeur.
À l’aide de symboles, il suggère l’indicible, sans le montrer directement à l’écran. Le craquement des lattes du parquet, une musique angoissante, le papier peint floral qui s’anime, et la voix douce de la comédienne Christa Theret nous plongent dans les souvenirs brouillés de la petite fille. Il est disponible en replay sur Arte jusqu’au 31 mars (avec un VPN). Encore mieux, on peut le voir sur grand écran dans les 700 Landmark Theatres qui projettent tous les shorts films nominés aux Oscars, jusqu’au 10 mars, un peu partout aux États-Unis. Pour trouver une séance près de chez vous, c’est ici.
Des images noir et blanc, une bande-son oppressante, et cette question, vertigineuse : comment transmettre aux jeunes générations la mémoire de la Shoah sans répercuter sur elles le traumatisme des survivants ? « Letter to a Pig », le court-métrage d’animation franco-israélien de Tal Kantor, est né d’une expérience que la réalisatrice israélienne a vécue, petite, à l’école.
Un rescapé de la Shoah lit, devant une classe, la lettre qu’il a écrite au cochon, qui, croit-il, a sauvé sa vie durant l’Holocauste. Ce récit bouleverse la jeune Alma, projetée dans un voyage intérieur, où la frontière entre le monde animal et humain s’estompe… Dans la vidéo de making-off ci-dessous, Tal Kantor explique le processus de création très technique du film, mêlant dessin à la main et vidéo. 17 minutes d’un film complexe et saisissant, à voir sur Arte ou dans les Landmark Theatres.
À partir de l’histoire vraie d’une mère célibataire tunisienne, Olfa Hamrouni, dont les deux filles aînées ont rejoint l’État islamique en Libye, Kaouther Ben Hania tisse un film poignant, à la frontière entre la fiction et le documentaire. Pour cela, la scénariste et réalisatrice tunisienne (actuellement résidente à la Villa Albertine) a mis en place un dispositif narratif complexe : la vraie Olfa et ses deux filles cadettes témoignent (et jouent leur propre rôle) face à deux actrices professionnelles qui interprètent les filles et sœurs disparues.
La parole et l’émotion jaillissent au sein de ce groupe de femmes, dévoilant un système d’oppression patriarcal perpétué dans la société, telle une malédiction, y compris de mères en filles. Nominé aux Oscars pour le meilleur documentaire, « Les filles d’Olfa » (produit majoritairement par la France) a déjà remporté de nombreux prix dans cette catégorie, notamment à Cannes, en mai 2023, et tout récemment, aux Césars 2024, à Paris. On peut le visionner aux États-Unis sur plusieurs plateformes vidéo, dont Amazon.
Dans un univers peuplé d’animaux où on peut fabriquer des robots pour pallier la solitude, Dog, un chien new-yorkais, se fait un nouvel ami : Robot. Ils jouent à la console, se baladent à Central Park, et deviennent vite inséparables. Mais lorsqu’un voyage à la plage laisse son ami Robot rouillé et immobilisé dans le sable, Dog doit retourner seul à sa vie d’avant. Les deux amis se retrouveront-ils ?
Dans ce premier long-métrage d’animation, le réalisateur multi-récompensé Pablo Berger dépeint un univers tendre et poétique, adapté de la BD de l’auteure-illustratrice américaine Sara Varon. Coproduit (minoritairement) par la France, « Mon ami robot » est une ode à l’amitié et à sa fragilité, avec en toile de fond, le New York des années 80. Il n’est pas disponible en streaming, mais petits et grands peuvent le voir dans certains Landmark Theatres.