Voilà 34 ans que Le Video, qui propose plus de cent mille titres disponibles à la location, dont environ cinq mille titres français et cinq cent québécois, a pignon sur rue au numéro 1231 de la 9ème avenue. Aujourd’hui, sa patronne Catherine Tchen, après s’être battue pendant près de cinq ans pour sauvegarder ce trésor de la culture francophone à San Francisco, est sur le point de jeter l’éponge.
«A 10 ans j’ai découvert les beaux films de cinéma, j’allais régulièrement à la Cinémathèque du Palais de Chaillot, j’ai découvert aussi le cinéma de Minuit. Tout ce que je fais, je le fais par passion.”
Le Video est né ainsi. A l’origine il y avait juste quelques Betas dans la vitrine de son magasin de photo, et puis petit à petit, et avec l’arrivée des VHS puis des DVD, Le Video a grossi. “Des films comme Hiroshima mon Amour ou Metropolis n’étaient pas disponibles, alors je les ai fait venir et c’est ainsi que nous nous sommes spécialisés. On a des films de divertissement bien sûr comme on a des perles rares qui ne se loueront qu’une fois tous les dix ans, mais nous les avons ! Un quart des films que nous proposons à la location sont introuvables ailleurs.»
Mais avec l’arrivée d’internet, de Netflix, les choses ont changé. Les magasins de location de vidéos ferment les uns après les autres. « C’est bien que Netflix existe, je regrette juste que ce soit devenu le seul moyen de voir des films.» explique Catherine Tchen, qui n’a rien d’une femme aigrie.
Quatorze ans ans qu’elle ne se paie plus, quatre ans et demi qu’elle paie de ses deniers la survie de son «bébé» avec l’argent de la vente de sa propriété à San Francisco. «Même mes employés ne sont pas là pour l’argent, ils ne se font pas de pourboires, ce sont des passionnés aussi, nous offrons un service, des conseils, je ne veux pas que cela disparaisse.»
Afin de préserver cet héritage culturel français, car ça en est un, elle cherche des solutions : « Nous recherchons un locataire pour tenir un café au rez-de-chaussée et garder le video store sur la mezzanine. Nous élaborons aussi un site web afin que tout membre puisse de chez lui accéder à un titre, voir sa disponibilité et venir le chercher.»
Il y a une époque ou le Vidéo pouvait compter dans sa clientèle des gens comme Robin Williams, Danny Glover, August Coppola, Chris Isaak, même Bertrand Blier a acheté l’un de ses films à Catherine Tchen! Le Video était de toutes les Premières au Festival du Film International de San Francisco. « Je ne cherche pas à faire d’argent, dit-elle, même si j’y en ai englouti beaucoup, je veux sauver Le Video. A chaque fois qu’il y a eu de l’argent, je l’ai réinvesti dans de nouveaux titres, tout part toujours dans l’inventaire, mais là j’en suis arrivée à un stade où je suis obligée de compter pour acheter de nouveaux titres, on a vraiment besoin d’aide pour rester en vie.»