Difficile de le rater : les façades entières de deux immeubles, au croisement de Spring et Wooster street, dans le quartier ultra branché de Soho, sont barrées de la marque et d’une inscription qui ne laisse que peu de place au doute : « Jacquemus, coming soon ». La marque qui monte en ce moment en France, du nom de son jeune créateur Simon Porte-Jacquemus, s’installe donc en plein cœur de New York (147 Spring St), à la place de l’ancien magasin Crocs ainsi que de Chic Boutique, qui vendait des robes de soirée à petits prix.
Difficile d’en savoir davantage sur la date d’ouverture et les détails de cette installation : l’entreprise française n’a pas répondu à nos sollicitations. Mais selon nos informations, cet investissement de plusieurs millions d’euros constitue un effort conséquent pour la marque, qui espère passer un cap ces prochains mois en doublant son chiffre d’affaires, son objectif, pour le porter à environ un demi-milliard d’euros dès l’an prochain. Les collections du créateur français prendront place sur plus de 500 m2 répartis sur plusieurs étages.
Il s’agira de la première boutique américaine de Jacquemus, qui ne s’est que très peu testé à l’international. Le créateur français, né à Salon-de-Provence en 1990, est pour l’heure surtout présent en France, à travers quelques adresses phares à Paris (une boutique et des corners aux Galeries Lafayette et Printemps Hausmann), ainsi qu’à Saint-Tropez. Les vêtements chics et branchés sont également distribués… à Dubaï, seul lieu hors de France actuellement. Le modèle de distribution de la marque ne correspond pas aux souhaits de développement de son fondateur, et le choix originel de n’être présent que dans peu d’endroits a vécu.
L’investissement prévu à New York, estimé « couteux » à l’intérieur de l’entreprise, a toutefois été vu comme inévitable. Jacquemus est également en train de chercher à s’implanter à Londres. Le Moyen-Orient est aussi ciblé par la marque pour de nouvelles boutiques. Pourquoi choisir New York ? Parce qu’au delà de l’image que souhaite véhiculer la marque, en s’associant à la ville qui ne dort jamais et qui est une des capitales de la mode, Jacquemus entend aussi réussir économiquement son expansion à l’international.
Jusqu’à présent, le développement de l’entreprise s’est fait à pas de velours. Très peu de marketing, une image savamment polie, et des lieux qui associent Jacquemus au luxe français. Fidèle à sa stratégie pas à pas, le styliste n’entend pas prendre de risque. D’autant plus qu’une polémique avait abimé l’image de la société il y a deux ans, des clients se plaignant de la qualité des pièces et pour des commandes livrées en retard. Des incidents que le créateur avait justifiés, via une publication sur les réseaux sociaux, par un pic de commandes inattendu.
Selon nos informations, Jacquemus souhaite poursuivre grâce à New York la stratégie entreprise avec succès par une autre marque française à la mode, AMI, du styliste Alexandre Mattiussi. La boutique AMI de… Soho est celle du groupe qui dégage le plus de revenus. Les deux marques surfent sur peu ou prou la même image du chic français, d’un style effortless qui plait tant aux Américains et de gammes moins genrées qu’ailleurs. Les gammes de prix sont également similaires, à partir de 300€ pour une chemise et les pantalons environ le double.
Sa venue à New York marquera une nouvelle étape dans l’aventure Jacquemus, qui a inauguré début mai à Paris ses nouveaux bureaux qui ressemblent davantage à une galerie d’art qu’à un siège social d’une entreprise qui emploie 250 personnes.