C’est l’une des plus belles collections d’art impressionniste au monde, mais elle restait pour beaucoup un mystère. Plus pour très longtemps. Le 26 mai prochain, la Fondation Barnes – un ensemble exceptionnel de 600 toiles de maîtres comprenant, entre autres, 181 Renoir et 69 Cézanne – ouvrira les portes de son nouveau musée en plein centre ville de Philadelphie, quittant pour toujours la villa de banlieue qui lui servait d’écrin depuis cent ans.
Situé à deux pas du Philadelphia Museum of Art et sa fameuse statue de Rocky, le site du nouveau musée a été dessiné par les architectes new-yorkais Tod Williams et Tsien. Façade contemporaine revêtue de pierres de la Mer Morte, fontaine aux nénuphars rappelant les tableaux de Monet, parc arboré: tout a été conçu pour offrir à cet extraordinaire concentré de chefs d’œuvre un cadre moderne et attractif. Surtout, il permettra de quintupler la capacité d’accueil de la Fondation Barnes, jusqu’à maintenant très limitée.
Amassée au début du siècle dernier par le Docteur Barnes, un richissime pharmacien de Philadelphie, la collection était hébergée depuis les années 20 à Lower Merion, la banlieue chic de Philadelphie, dans la demeure de feu son propriétaire. Les lieux avaient le mérite d’être authentiques, mais ils étaient peu pratiques. Lointains, dépourvus de parking et ouverts trois jours par semaine seulement, ils ne permettaient d’accueillir que 67.000 visiteurs par an, et il fallait acheter ses billets au moins un mois à l’avance pour avoir la chance d’y pénétrer. Criblée de dettes, la Fondation Barnes était au bord de la faillite. Elle a réussi à lever 200 millions de dollars pour se doter de ce nouveau musée, qui lui permettra, espère-t-elle, de se faire mieux connaître du grand public et de remettre ses finances à flot.
Pour la ville de Philadelphie, c’est un évènement très attendu, qui devrait encore renforcer l’attractivité de cette ville déjà bien pourvue en musées et monuments historiques. Il marque aussi la fin d’une longue polémique, qui a vu les partisans et les opposants au projet se déchirer pendant de longues années à coups de procès, d’articles de presse et d’un documentaire à charge intitulé “The Art of Steal”.
Au moment de sa mort, en 1951, le Docteur Barnes avait en effet fait promettre que sa collection ne quitte jamais les lieux de sa maison, pas même pour des opérations de prêt. Autant de vœux qui ont été trahis puisqu’en 1993 déjà, une partie des œuvres avaient voyagé à Paris le temps d’une exposition au Musée d’Orsay. Ce déménagement en centre-ville signe pour certains un affront définitif et intolérable au testament du Docteur. « C’est tout le contraire, rétorque Derrick Gillman, Président de la Fondation Barnes. En rendant la collection plus accessible et mieux éclairée, nous l’avons ressuscitée». Enrichi d’un espace d’exposition temporaire de 500 m2, d’une cafétéria et d’une bibliothèque, le nouveau musée Barnes reproduit à l’identique l’architecture des pièces de la villa de Lower Merion; l’accrochage des tableaux de la collection permanente a été respecté à la lettre. Bref, c’est comme si la villa s’était transposée en centre-ville. Vous ne savez pas quoi faire pour Memorial Weekend ? C’est peut-être l’occasion de vous rendre à Philadelphie. Pour l’inauguration, la Fondation Barnes a prévu trois jours de festivités.
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